« Pour ses arrières-petits enfants, qui s’interrogeront peut-être un jour à propos d’une vieille croûte poussiéreuse dans un débarras »
Jusqu’à un âge très avancé, ma mère peignit… Elle en fit même son passe-temps favori pendant de longues années. Mais paradoxalement, alors que petite fille, elle aimait déjà dessiner et colorier, ce n’est qu’assez tardivement qu’elle s’y mit vraiment. En fait, ce n’est qu’à la cinquantaine échue, qu’elle reprit ses mines de plomb, ses aquarelles, ses gouaches et ses pastels. Ses sanguines aussi, ainsi que ses fusains et ses craies, car elle était touche-à-tout…
Un peu comme si, à l’automne de sa vie, elle retrouvait une idylle de jeunesse, occultée depuis longtemps par les vicissitudes de l’existence, et qu’il fallait vite rattraper le temps perdu! Comme s’il y avait urgence à révéler au grand jour, une intrigue d’enfance, soigneusement et secrètement entretenue!
Elle s’adonna alors sans retenue à cette passion si longtemps étouffée, avec l’empressement de la néophyte ou de l’autodidacte, sans d’ailleurs chercher à en apprivoiser les codes, les règles ou les standards…Elle peignait et dessinait sans trop s’embarrasser d’autres contraintes esthétiques que celles qu’elle se donnait. Sans aspirer non plus à une reconnaissance universelle qui éclairerait la postérité ou encombrerait les réserves de musées d’outre-atlantique ou de province…
Elle peignait d’instinct, des paysages, des natures mortes, des fleurs… Jamais de portraits. Juste pour le plaisir de l’instant, juste pour rêver de couleurs et d’horizons imaginaires, sans échafauder de lendemain prometteur qui, en toute logique, n’avait aucune raison d’être. Elle ne se berçait pas d’illusions sur la permanence ou la valorisation de son travail, mais elle en était fière et s’en revendiquait. C’était l’expression tangible de sa liberté. Elle peignait, en somme, pour se sentir exister.
Puis un jour, sans rien renier de ce qu’elle s’était évertuée à réaliser, quotidiennement durant quatre décennies, elle décida, sans crier gare, de ranger ses pinceaux et ses spatules… Prétextant que sa main tremblait, elle remisa sa palette et ne toucha plus à ses toiles ou à ses cahiers de dessin!
Cette résolution apparut dans un premier temps, énigmatique à son entourage! Faisait-elle vraiment sens au-delà des fausses évidences sur son état de santé et des apparences, ou de ce qu’elle en disait pour nous égarer? Se pouvait-il qu’il ne s’agisse que d’un caprice de vieille dame, d’une coquetterie imputable au grand âge, ou encore d’une sorte de « roublardise » dont ma mère était friande? Juste pour se faire prier…
Ses handicaps physiques qui, certes, se multipliaient, étaient-ils, comme elle le prétendait, la principale et unique cause de son renoncement?
Ou fallait-il en demander plus et s’efforcer d’accéder à la quintessence de sa démarche créative pour comprendre cette retraite soudaine, sans sommation ou symptôme patent préfigurant l’inéluctable?
La cause en était manifestement plus profonde qu’on ne le supposait, et certainement indicible. D’ordinaire peu effarouchée, volontiers diserte en société, bavarde même et parfois pusillanime aux yeux de ses détracteurs, ma mère adoptait ici une posture de mutisme sélectif qui ne lui ressemblait pas…Clairement, elle n’avait pas l’intention de fournir d’autre explication que celle du léger tremblotement de ses mains, et ne semblait pas disposée à livrer à quiconque les arcanes de son intimité, de ses contrariétés et de ses sentiments … Et pourtant, dans le cas d’espèce, c’était probablement dans cette voie qu’il convenait de rechercher la clé.
S’il fallait attribuer cette démission à une sorte de fêlure et la comparer à d’autres craquelures ou gerçures de l’âme, on pourrait sans doute la rapprocher de l’embarras éprouvé par de vieux tourtereaux se retrouvant sur la Toile, un demi-siècle après la fin de leur marivaudage adolescent… et qui, au plaisir d’improbables retrouvailles, préfèrent s’abstenir de réveiller d’antiques cicatrices pour ne pas s’effrayer mutuellement de ce qu’ils sont devenus.
Alors, c’est en mémorialistes de leurs vies que les anciens flirts évoquent leur fougue de jadis, en évitant soigneusement d’empiéter sur leurs destinées en cours. Ils savent en effet qu’ils n’ont plus rien à attendre ensemble du présent… Ce comportement répond sans doute au souci d’épargner à l’autre, mais surtout à soi-même dans le regard de l’autre, l’image dégradée que renvoie une actualité qui ne peut plus servir de décor à leurs amourettes passées. D’aucuns y verront une forme revisitée de stoïcisme: une quête nostalgique du bonheur par la tempérance.
C’est sûrement dans cet état d’esprit que ma mère décida un jour d’abandonner sa peinture. Pour ne pas souffrir. Pour ne pas subir la déchéance d’un talent dont elle se créditait sans fausse modestie, mais dont, confrontée à l’érosion du temps, elle mesurait la fragilité,
Ayant perdu une grande partie de son autonomie physique – donc de son indépendance – ma mère ne supportait plus que l’image d’artiste qu’elle était parvenue à imposer à ses familiers, ne fusse irrémédiablement écornée par le spectre d’une vieillesse envahissante et impitoyable. Et ce, d’autant plus que ce statut d’artiste-peintre dont elle jouissait auprès de ses proches et qu’elle ne devait qu’à elle-même, constituait certainement un des principaux marqueurs identitaires de la seconde phase de sa vie. Et probablement celui qui lui tenait le plus à cœur après celui de mère, car il incarnait son émancipation après des années d’oubli de soi-même au profit de ses enfants et de son mari…
Dorénavant, elle ne pouvait se résoudre à produire un travail – à ses yeux – de moindre qualité, dont elle estimait qu’il ne saurait susciter d’autres appréciations que celles dictées par la piété filiale ou la compassion. A quoi bon poursuivre si l’on perd toute aptitude à provoquer l’émotion, à plaire ou à séduire par la seule force de son talent!
Redoutant le naufrage et la médiocrité, et refusant la charité, elle choisissait d’anticiper l’abandon en prenant l’initiative de jeter l’éponge… Elle préférait désormais s’en tenir aux quelques dizaines – voire centaines- de dessins ou toiles effectivement réalisées, dont elle fit son patrimoine présentable.
Rien ni personne ne purent la convaincre du contraire. Ripoliner ou peinturlurer avait été sa manière de tromper le temps. Désormais, ce dernier lui échappait!
En revanche, elle ne dédaignait pas qu’on admirât celles de ses « œuvres » exposées dans son appartement de Massy… Celui qu’elle habitait avec mon père, et qui fut son unique atelier. Mais, dès qu’on tentait de l’inciter à poursuivre son travail, elle détournait la conversation. Si, plaisantant, on insistait en présentant son handicap comme « un atout » pour réaliser des œuvres pointillistes « à la Paul Signac », elle répétait, agacée en perdant tout sens de l’humour, que sa « fichue » ostéoporose à l’origine des raideurs dont elle souffrait, lui interdisait la maîtrise de ses mouvements et une station prolongée à son chevalet ou à sa table de dessin.
Un point, c’est tout!
Dès lors, sa palette de couleurs devint définitivement orpheline, délaissée et figée sur une étagère du petit meuble vitré, qui faisait office de placard aux peintures, aux huiles, aux brosses et aux pinceaux. Celui-là même où étaient aussi entreposés les cartons à dessins et rangés ses pinceaux!
Lorsqu’elle commentait ses tableaux – exercice auquel elle se livrait volontiers et même avec délectation- elle le faisait à sa manière en s’attardant sur les circonstances, sur son humeur ou sur les anecdotes, qui l’avaient conduite à choisir tel sujet ou à privilégier tel motif ornemental. Mais elle ne s’attardait pas sur la technique qu’elle considérait, à tort ou à raison, comme accessoire, voire dérisoire.
Ce n’est pas en effet, au nom d’une expertise, qu’Adrienne parlait de ses tableaux, car elle connaissait leurs imperfections, mais comme une femme qui avait trouvé dans l’expression picturale, un moyen propre de faire entendre sa subjectivité, de conquérir son autonomie et de faire valoir sa liberté d’être…
Dans ce « domaine réservé » dont elle ne livrait à son entourage que ce qui lui convenait, son mari n’avait guère d’autre option que d’admirer, « encadrer » les œuvres, et, le cas échéant, les suspendre au mur du salon!
Il est symptomatique que dans ce couple, né d’un coup de foudre illuminé par le militantisme jociste dans l’allégresse des mois qui suivirent la Libération d’Angers en 1944, mon père, photographe amateur compulsif, n’ait pris aucun cliché de ma mère à son chevalet, alors qu’il nous a légué des milliers de photographies, dont de très nombreuses d’elle, en noir et blanc ou en couleur, en format 6×9 ou en 24×36 et autant de diapositives! Cette omission n’était probablement pas fortuite!
Pour lui comme pour elle, la manumission par l’art était extérieure à leur contrat de vie en commun… Il n’est d’ailleurs pas exclu que cet affranchissement fût perçu par l’un et l’autre, comme potentiellement destructeur d’un équilibre conjugal adossé à des siècles de tradition. Mais tandis qu’elle y entrevoyait là un enrichissement personnel et une forme de libération, lui se sentant peut-être relégué, en concevait sûrement une sourde crainte.
Lui, il se souvenait qu’une fois pour toutes, lors de leur mariage en décembre 1947, leur amour irréfutable avait été sanctifié, donc par définition déclaré éternel et fusionnel! » Conventionnellement fusionnel »! Mais au sens où on l’entendait après-guerre dans les provinces de l’Ouest et dans une famille de militants chrétiens de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne et ultérieurement de l’Action Catholique Ouvrière…Ce postulat, Maurice aimait le rappeler avec émotion, chaque année, aux dates anniversaires de ce mariage qu’ils conquirent, à l’époque, de haute lutte! …
Un serment qui semble aujourd’hui « très daté » et en décalage avec l’évolution actuelle des mœurs ainsi qu’avec l’objectif d’égalité « réelle » des sexes dans tous les domaines de la vie!
Après les années de pétainisme et d’oppression nazie, la génération de jeunes femmes et de jeunes hommes, assoiffés de liberté, à laquelle appartenait mes parents, était sans conteste, avide de progrès social et perméable aux idées nouvelles du Conseil National de la Résistance, mais elle n’échappait pas, en matière de comportement individuel à la tradition patriarcale, castratrice et conservatrice relayée par une église catholique encore puissante dans ces pays de la Chouannerie et des Guerres de Vendée…
Confortés par un code civil qui qualifiait encore le mari de « chef de famille », les hommes jouissaient du meilleur rôle, tandis que les épouses se perdaient dans les contraintes et les sujétions du mariage et des maternités dont elles assumaient l’essentiel de la charge! La notion de parité des sexes ne relevait pas encore de l’utopie; elle n’était pas du tout invoquée. Et la majorité d’ailleurs n’y trouvait rien à redire, en particulier de nombreuses femmes dans la classe ouvrière, qui ne concevaient pas la vie autrement que dans le sillage de leur mari. Elles en partageaient leurs luttes lorsqu’ils étaient syndiqués, et subissaient passivement – sans trop s’en formaliser – cet apartheid juridique, politique, économique et social.
Dans ce contexte, peindre sans en référer à quiconque, était, pour ma mère, une manifestation d’indépendance et de reconnaissance, une bouffée d’air frais, et aussi, une contestation « à bas bruit » de l’homme qu’elle n’a jamais cessé d’aimer mais dont elle déplorait tacitement le peu d’enthousiasme à procéder à une sorte d’aggiornamento domestique, alors qu’il était toujours partant, hors les murs, pour faire la révolution sociale ou politique …
L’art dont elle se revendiquait était donc l’exutoire d’un mal-être et l’échappatoire qu’elle avait choisie pour s’affranchir de toute emprise, y compris conjugale. Et c’est sans doute avec un certain contentement, qu’elle portait cet innocent petit « coup de canif » au contrat du bon usage du mariage chrétien contracté dans un passé lointain sous un parrainage christique, dont elle doutait de la bienveillance! Lui au contraire fut habité jusqu’à son dernier souffle de la « foi du charbonnier ».
Je suppose que tous les deux le comprirent ainsi mais ne se l’avouèrent pas.
Dans les dernières années de sa vie, ma mère, devenue exigeante, lui fit d’ailleurs payer « cette dette » dont il ne comprit pas nécessairement la nature et la portée, mais que par amour, il ne discutait pas, acceptant de se muer en serviteur attentionné et repentant de la dépendance de sa femme!
N’empêche, aucun des tableaux d’Adrienne ne fut dédié à Maurice, et aucun n’eut pour thème central, la religion ou la soumission au créateur…
La passion de ma mère pour la peinture ne s’est pleinement exprimée qu’après que les « enfants furent élevés ». Mais, elle ne devint pour elle une impérieuse nécessité qu’au moment où elle s’expatria de son Anjou natale pour suivre Maurice en région parisienne. Ce fut un traumatisme qui la hanta le restant de ses jours, car elle avait sacrifié – une fois de plus – son destin personnel à celui de son mari, en abandonnant une carrière professionnelle renaissante après plus de vingt ans d’interruption… Elle s’était en outre irrémédiablement éloignée de son réseau d’amitiés, souvent très anciennes….
C’est dans la peinture qu’elle noya sa tristesse…
Dans ce contexte, il lui importait peu de respecter les lois de la perspective, d’ignorer les points de fuite ou de se fixer une ligne d’horizon… Son besoin de reconnaissance n’avait nul besoin de s’appuyer sur des règles ou des conventions esthétiques classiques pour clamer ses sentiments sur le papier ou sur la toile.
Peu importe les reproches qui lui étaient adressés de ne recopier que des images de cartes postales ou de contrefaire maladroitement les œuvres des « génies » de la peinture… Elle ne les entendait pas. Elle peignait à sa guise, sans autre considération que de se faire plaisir et d’épancher une soif personnelle de création…
Pour apprécier, peut-être fallait-il s’intéresser aussi à l’envers du décor!
De la sorte, si son » Paysage de Marcoussis » présente des similitudes avec le chef d’oeuvre éponyme de Jean-Baptiste Corot (1796-1875), dont elle s’est probablement inspirée, il serait vain d’établir une comparaison entre un maître des paysages du 19ième siècle, précurseur de l’impressionnisme, et l’amatrice ingénue qui s’amuse à expérimenter les lavis d’aquarelle sur une campagne d’Île de France.
Tout juste peut-on dire, que les deux peintres avaient le même âge lorsqu’ils réalisèrent le tableau…
Mais moi, dans ce tableau que ma mère m’a offert en 2002, et dont je ne méconnais pas les défauts, je ressens l’expression singulière de sa sensibilité et de sa personnalité, et j’y reconnais aussi un peu de son histoire, donc, de la mienne par ricochet. Ce tableau me parle, tandis que je trouve celui de Corot, magnifique et inégalable, comme s’il avait posé son chevalet dans mon propre jardin
Pour moi, tous deux flirtent avec l’universel, mais à des lieues de distance et dans des cours différentes…
Respectueuse du génie, elle aurait partagé ce point de vue; elle qui collectionnait les ouvrages dédiés aux Impressionnistes, et ne se lassait pas d’admirer leurs œuvres. Elle, qui, du temps où mon père conduisait encore, n’aimait rien tant que de se promener dans les allées de Giverny à la recherche des Nymphéas de Monet.
Elle, qui prit tant de plaisir, il y a une quinzaine d’années, à déjeuner à la terrasse de la Maison Fournaise à Chatou, là où Auguste Renoir composa « le Déjeuner des Canotiers ».
Jamais, elle n’aurait eu l’outrecuidance de se comparer aux grands peintres de l’histoire. Elle apportait sa petite touche personnelle à une épopée qui la dépassait, sans prétendre franchir les limites de son salon.
D’ailleurs, lorsqu’elle faisait cadeau d’un de ses tableaux à l’occasion d’une naissance, d’un anniversaire ou d’une fête, ce n’était pas une oeuvre d’art qu’elle transmettait mais un petit souvenir de la mère, de la grand-mère et de l’arrière-grand-mère!
Peu comprirent qu’à travers ce cadeau souvent perçu comme un fardeau plus ou moins encombrant dans des ameublements conçu par IKEA, elle faisait passer un message sur sa propre conception de la création et de la liberté d’imaginer sa vie… Sur sa vision de la famille, qui ne passait pas nécessairement par le discours réducteur des unions d’un autre siècle …
Les années passèrent. Ses tubes de peinture durcirent dans leur boite…
Puis un jour, elle s’en alla pour ne plus revenir…
Il fallut alors décrocher les tableaux, vider l’armoire aux couleurs, effacer les traces de son atelier… et remonter le temps à contre courant des vents dominants! Tenter enfin de répartir des œuvres dont personne au fond ne voulait plus vraiment s’encombrer! Pourquoi en effet congestionner les greniers de tableaux de grand-mère, dont aucun ne sera jamais vénalement négociable? Pourquoi s’embroussailler la mémoire de souvenirs qui s’accommodent difficilement du « nouveau monde » à des années lumière de la connexion permanente aux innovations de l’intelligence artificielle?
C’est au cours de cet emballage vers une destination incertaine des tableaux de ma mère, qu’on découvrit, parmi quelques rares peintures sur soie de ses débuts, une toile inachevée... Et exceptionnellement, un arrangement qu’elle avait elle-même composé dans sa salle de séjour, qu’elle avait photographié et qu’elle avait commencé à reproduire.
Sur une solide et épaisse table de chêne, encadrée par trois chaises d’ancienne facture, elle avait disposé un vin des « Coteaux du Layon » embouteillé par mon père, un livre ouvert et un verre d’Anjou, à ouverture tronconique, si caractéristique.
Les « Coteaux du Layon »!
C’était le vin incontournable de toutes les fêtes familiales à Massy, le vin blanc du paradis perdu, celui plus ou moins sucré, plus ou moins coloré d’un beau soleil du terroir, qu’on dégustait religieusement et conformément à un rituel scrupuleusement respecté, en apéritif puis au dessert, et toujours, dans des « verres à vin d’Anjou » en cristal fin monté sur une fine colonne, présentes depuis près d’un siècle sur les tables angevines et celles de la diaspora.
Chacun y retrouvait la saveur de la terre patrie… Ma mère, au premier chef !
Elle n’était d’ailleurs pas la dernière à donner son appréciation sur la qualité du dernier crû ouvert! Et à reprendre une petite « lichette » au deuxième service.
Mais un jour, elle est partie sans finir son verre!
Cette esquisse « inachevée » est peut-être l’ultime leçon qu’a voulu dispenser ma mère sur la fragilité du monde réel… mais c’est possiblement aussi l’illustration d’une double exigence qu’elle n’est sans doute pas parvenue à totalement concilier, celle de la fidélité à la tradition de ses aïeux et à leur terroir, et celle de la création en toute indépendance pour témoigner et exister.
Pour ces motifs, ce tableau non concluant qui aurait pu disparaître dans les « encombrants » m’est devenu précieux! Car il introduit le doute… C’est certainement aux pages du livre laissé ouvert par ma mère, qu’on trouve sûrement les fils d’Ariane propres à lever ce doute.