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Il y a vingt ans, le dimanche 20 janvier 2002, par une nuit sans lune, Jean-Marc Salinier (1944-2002) s’éteignait Forcément quand un ami nous quitte, la nuit est toujours « sans lune ». Foudroyé chez lui aux Ulis (91), par un infarctus du myocarde, il n’était âgé que de cinquante sept ans.

Au petit matin, la triste nouvelle diffusa dans la ville comme une trainée de poudre. Elle provoqua la sidération dans le cercle des élus municipaux des Ulis dont il était un des leurs depuis près de vingt ans. Depuis 1989, il était d’ailleurs le premier adjoint au maire et conseiller général du canton constamment réélu – et haut la main – depuis 1988.

Ce fut enfin la consternation dans les rangs de ses très nombreux amis, car Jean-Marc était avant tout un copain, c’est-à-dire quelqu’un de foncièrement chaleureux avec lequel on aimait « partager le pain »! Sans oublier le « bon vin » !

Originaire du Sud-Ouest, né en plein cœur du pays libournais, Jean Marc était en effet un passionné de la vie. Auprès de tous ceux qui l’approchaient, alliés comme adversaires politiques, il manifestait une sorte de convivialité joyeuse, sans pour autant taire de fortes convictions à gauche qu’il défendait avec ténacité. Et aussi avec beaucoup d’élégance!

Militant socialiste de longue date, il n’était pas de ces idéologues doctrinaires qui, depuis 1981, se disputaient la direction du parti socialiste dans le département de l’Essonne. Il n’appartenait en fait à aucune coterie même si, à la fin de sa vie, il se réclamait plutôt de la tendance hostile au tropisme technocratique socio-libéral du parti socialiste, aux côtés du très républicain et rugueux député des Landes Henri Emmanuelli (1945-2017).

A la différence de ses « camarades » essonniens aux egos surdimensionnés, qu’il croisait à la Fédération départementale et qui aspiraient à un destin national à l’avant-garde du mouvement ouvrier, il ne puisait pas, comme eux, la substance et le fil de ses discours dans une histoire instrumentalisée du marxisme ou du bolchévisme trotskyste. Doué d’authentiques talents de tribun populaire, c’était avant tout un pragmatique qui prenait le réel à bras le corps mais qui n’hésitait pas à « pousser un coup de gueule » lorsque les principes de liberté, d’égalité et surtout de fraternité, auxquels il se référait, lui apparaissaient bafoués avec cynisme. Et ce, quels que soient la nationalité, la couleur de peau, la religion ou l’âge de ceux auxquels il s’adressait avec véhémence.

Certes il préférait plutôt convaincre qu’imposer. Et à cet égard, il savait user, avec habileté, de sa voix grave et grumeleuse de fumeur, ainsi que des artifices bien rodés de la rhétorique militante, et même de la ruse, sans abandonner pour autant la logique de bon sens qui l’animait et le caractérisait, et surtout sans reculer d’un pouce sur les valeurs auxquelles il croyait. Valeurs de morale politique, que globalement, nous partagions! Dans ce registre, la rigueur et le travail étaient sa marque de fabrique et c’est ainsi qu’on l’aimait!

Grand affectif, parfois plus sentimental que froidement rationnel, il soutenait volontiers la controverse et ne redoutait pas l’affrontement dialectique, mais il n’en tenait nullement rigueur à ses contradicteurs, car il ne connaissait ni la rancœur, ni la rancune, même si parfois il exprimait certaines déceptions, en particulier après certains échecs. Ces derniers notamment électoraux furent rares au cours de sa carrière mais ils pouvaient l’affecter profondément et peut-être durablement. Ce fut certainement le cas en 1997 lorsqu’il perdit d’extrême justesse le siège de député de la cinquième circonscription de l’Essonne qu’il avait conquis sur la droite, deux ans auparavant à la faveur d’une élection législative partielle.

Le choc fut d’autant plus rude que cette année-là, la gauche devint majoritaire à l’Assemblée Nationale après la dissolution décidée par le Président Chirac et que Lionel Jospin, l’ancien patron des socialistes, devenait Premier ministre.

Sa nomination au Conseil Economique et Social en 1997 jusqu’en 1999 n’effaça pas complètement ce revers qu’il vécut comme une injustice, même s’il s’attela de son mieux, en travailleur consciencieux et homme de dossiers qu’il était, aux travaux très techniques de la section des activités productives, de la recherche et de la technologie, à laquelle il avait été affecté.

A son décès, Jean-Marc exerçait le mandat de premier adjoint au maire des Ulis mais également celui de vice-président du Conseil général de l’Essonne, chargé du sport, de la culture et de la vie associative. Il était en outre le leader local du Parti Socialiste.

Elément fédérateur n’appartenant à aucune des chapelles qui se chicanaient à la direction du parti socialiste en Essonne, il fut même, un temps, le « patron » œcuménique de la fédération socialiste du département.

Aux Ulis en tout cas, il incarnait l’autorité politique de proximité et était le leader incontesté de la gauche, surtout depuis que Paul Loridant (1948-2020), qui exerçait les mandats de maire et de sénateur, avait rejoint un peu moins de dix ans auparavant le Mouvement des Citoyens, cofondé par Jean-Pierre Chevènement et Max Gallo.

L’appartenance des deux personnalités Ulissiennes de la gauche non communiste à des formations politiques différentes, provoqua cependant quelque tension et suscita une certaine rivalité. Pour autant, ils abordaient les questions municipales de manière complémentaires. En outre, faisant preuve l’un comme l’autre, d’un grand sens des responsabilités et conscients que l’intérêt général primait, ils firent en sorte, que cette concurrence ne portât pas préjudice à la ville et n’entravât en rien sa bonne gouvernance.

Le pari fut tenu. En dépit de leurs divergences sur la politique conduite au niveau national, ils demeurèrent solidaires dans la gestion de la ville, y compris dans ses perspectives d’avenir.

Aussi en cette triste matinée du 20 janvier, tous les membres du conseil municipal joignables, quelles que soient leurs tendances ou options politiques, éprouvèrent le besoin de se réunir dans le cabinet du maire pour évoquer la mémoire de celui qui venait de nous quitter sans sommation dans la nuit. Sans autre propos que de rendre hommage à un ami unanimement apprécié. Chacun rappelant une anecdote ou un souvenir en sa compagnie, comme pour conjurer la surprise de sa disparition.

Rien, en tout cas, ne laissait présager une fin si précoce aux yeux de ceux qui le fréquentaient dans l’exercice de ses mandats politiques. Au-delà du militant politique, dynamique et volontaire, un peu « grande gueule » , c’était non seulement un ami fidèle qui nous quittait, mais aussi un homme dont on s’apercevait trop tard qu’il ne laissait rien paraitre de ses difficultés probables de santé et qu’il gardait sans doute pour lui, ses secrètes fêlures. C’est tout juste si certains d’entre nous savaient que quelque temps auparavant, il avait perdu un frère victime d’une crise cardiaque. Sur sa vie privée et intime, Jean-Marc ne discourait pas.

Elu de terrain avec la noblesse que ce statut requiert et dans toute l’acception du terme, Jean Marc était attentif aux accrocs de la vie de ceux qui se confiaient à lui dans ses permanences du samedi matin. Mais sûrement entrainé par son enthousiasme et ses responsabilités, il s’oubliait un peu lui-même.

Côte à côte au Conseil municipal des Ulis – années 1990

Pur produit du Sud-Ouest, émigré en Ile-de-France pour motif initialement professionnel, Jean Marc était, avec un style qui lui était propre, le digne héritier des radicaux-socialistes d’antan, qui fondèrent la République mais qui étaient d’abord d’inflexibles humanistes épris de la philosophie des Lumières. Comme eux, il aurait aimé haranguer le citoyen sous les préaux d’école. A sa manière d’ailleurs, il s’y livrait ne ratant jamais une occasion de débattre avec ses concitoyens. Avec l’accent chantant en prime et de préférence le soleil rasant des soirées estivales préélectorales. Comme eux, il parlait haut et fort et aimait les joutes oratoires.

De métier, Jean-Marc était cadre supérieur de la Poste. Les circonstances de la vie ont fait que la politique, c’est-à-dire, à ses yeux, le service de la collectivité, a fini par monopoliser sa vie. Mais il n’a pas rejoint la politique active tel un haut fonctionnaire formaté à l’art de l’esquive et destiné à prospérer puis à pantoufler sous les ors de la République. Il n’a pas cherché non plus à se transformer en théoricien du marxisme ou en donneur de leçons d’histoire du socialisme.

Son sens des autres, son empathie spontanée et son besoin d’être utile, autrement dit, son militantisme inné, se sont d’abord exprimés et presque naturellement au sein du mouvement associatif, notamment celui des Jardins Familiaux des Ulis, créés en 1979 au sud de la ville pour permettre aux familles des HLM de s’aérer et retrouver le plaisir ancestral de cultiver la terre. Et de fil en aiguille, via aussi son intérêt pour le sport aux Ulis pour lequel il se mobilisa également, le virus politique a progressivement investi son quotidien puis une grande part de son existence, jusqu’à ce sinistre 20 janvier 2002 où la mort a pris le relai sans crier gare !

Vingt ans après que reste t-il des traces laissées par Jean-Marc Salinier, de ses engagements militants ou de son exemple, au-delà d’un nom à l’entrée d’un stade ?

Pour les plus anciens, des souvenirs demeurent, qui se bousculent comme ces apéros du samedi matin après nos permanences respectives. Nous refaisions le monde, la clope au bec et un verre de whisky à la main! Il reste ces séances mémorables du Conseil municipal jusqu’à tard dans la nuit… Ces tirades ou ces engueulades amicales. Il reste le souvenir de ces réunions de section du PS dans une salle enfumée de la Maison pour tous des Amonts puis dans le local du parti encombré d’affiches et de tracts. Il reste les collages de nuit dans la ville endormie et les tractages du dimanche matin sur le cheminement piétonnier dominant le marché des Ulis à l’angle de la pharmacie.

Même ces lieux ont été aujourd’hui reconfigurés.

Pour les moins de vingt ans, n’appartenant pas au cercle de ceux qui l’ont connu, il est donc possible que son seul nom n’évoque plus rien d’autre que l’adresse d’un stade de foot ou d’une manifestation d’athlétisme ! Le temps qui passe est décidément cruel et ingrat.

De même que reste t-il de la Gauche de Jean-Marc Salinier! Qu’est-elle désormais devenue? Généreuse, progressiste, joyeuse, désintéressée, solidaire et fraternelle, et solidement ancrée sur des principes humanistes, elle est en voie de disparition. Existera-t-elle demain ailleurs que dans les livres d’histoire au chapitre de Jean Jaurès ou de Léon Blum?

Devenue inaudible faute d’avoir su actualiser son discours et sa vision du monde, elle se montre aujourd’hui incapable d’entrevoir l’avenir ou même de susciter la moindre utopie. Pourquoi?

Inaudible et sans voix, à force d’en avoir trop, discordantes et opportunistes. Ne sachant plus trop où elle habite, cette Gauche s’obstine malgré tout à ressasser de vieux poncifs hors d’âge et à nier une réalité démographique, sociale et sécuritaire et même identitaire, à bien des égards troublante, et qui pourtant s’impose à tous. Elle continue de ronronner, reniant, les valeurs mêmes qui l’ont portées et guidée comme la laïcité. Et ce, au nom d’une pseudo-tolérance faisant la part belle à l’intolérance et à l’obscurantisme que nos pères nous avaient appris à rejeter.

Prisonnière de la montée en puissance d’une pensée mystico-religieuse et climato-angoissante, elle renonce à postuler que l’avenir de l’humanité réside dans le progrès, et se transforme en une sorte de caveau d’ambitions subalternes, aussi envahissantes, stériles et finalement nocives que les gaz à effets de serre dans l’atmosphère terrestre.

Aujourd’hui, cette Gauche qui fut le berceau de toutes nos espérances, est moribonde. Suicidaire elle apparait « éparpillée par petits bouts, façon puzzle » comme disait Bernard Blier dans les Tontons Flingueurs. Façon puzzle, mais sans perspective crédible de recomposition.

Jean-Marc Salinier est bien mort, il y a vingt ans, mais on ne parvient pas à faire le deuil de sa conception progressiste de la société et de son évolution. Fut-t-il vraiment un des derniers mohicans socialistes à visage humain? Une dernière lumière à l’approche d’un trou noir. Espérons que non!

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Il n’aura sans doute échappé à personne que nous sommes en pleine campagne électorale des « Présidentielles » et qu’une des notions qui fait le « buzz » – comme on dit maintenant – est celle « d’emploi fictif ».

Merci à Ph. Bouvard pour ce prêt "involontaire" de saillie.

Merci à Philippe Bouvard auquel j’ai emprunté cet aphorisme

On pourrait même dire sans exagérer qu’avec l’appui d’une autorité judiciaire peut-être complaisante et partisane, c’est la principale arme que les candidats s’envoient mutuellement dans les jarrets pour entraver la marche de leurs concurrents vers une hypothétique victoire…

Autrefois, on aurait plutôt évoqué la corruption ou le népotisme… On aurait sûrement privilégié l’accusation de clientélisme contre ceux – qu’on connaît tous – qui usent exagérément de leur position pour s’attirer les bonnes grâces de l’électeur…On ne se serait sans doute pas privé de citer les fils des copains rémunérés pour réaliser un rapport bidon dans le cadre d’un stage obligatoire de fin d’études.

Mais, désormais, les charmes de ces mots compliqués sont épuisés. Ils ne surprennent plus. Même pénalement, c’est de la routine. Le concept « d’emploi fictif » est devenu le nec plus ultra des joutes médiatiques et le terrain privilégié des coups bas. Il recouvre d’ailleurs toutes les autres notions, et occulte même les programmes électoraux qui, dans le passé, faisaient les beaux jours des vendeurs de promesses…

Souvenons-nous avec émotion du discours du Bourget de janvier 2012 de l’actuel président de la République – alors candidat – qui avait réveillé en nous les mânes de Jaurès, pour accoucher cinq ans plus tard d’un Emmanuel Macron ! L’un fut reçu premier en 1878 à l’Ecole Normale Supérieure et devint agrégé de philosophie, l’autre, élevé chez les jésuites, échoua au même concours, mais devint inspecteur des finances et banquier d’affaires…et ministre de gauche.

Nul n’était besoin dans ces époques lointaines d’agiter le spectre devenu monstrueux de l’emploi fictif.

Faut-il s’en plaindre ? Je n’en sais rien, et de toute manière, il faudra bien voter… Et comme on ne peut plus le faire en faveur de Jean Jaurès !

A propos de ce « sacré » Jean Jaurès, on peut penser, quelle que soit sa puissance d’analyse et sa maîtrise incomparable de notre langue, qu’il aurait sans doute été sidéré et qu’il aurait ouvert des yeux ahuris, si, lors de ses controverses légendaires avec Georges Clemenceau, au début du vingtième siècle à la Chambre des Députés, on l’avait accusé de voler la République en rémunérant des emplois fictifs!

Lui-même n’aurait certainement pas usé de cet argument – surréaliste sous la troisième république  – y compris en 1885, lorsqu’il fut élu pour la première fois, député du Tarn, face au caricatural baron René Reille, qui tenait depuis toujours les « Montagnes Noires » sous son emprise féodale.

Il n’est même pas sûr  que lui, l’homme intègre et cultivé aurait compris de quoi il s’agissait! Aurait-il déduit qu’il pouvait être question de l’argent qu’il donnait parfois sur sa cagnotte de parlementaire aux militants de la SFIO en difficulté, ou aux ouvriers de Carmaux en grève? Lesquels, en contrepartie rendaient quelques menus services officieux pour la diffusion de l’Humanité? Sa générosité gratuite aurait t-elle été une faute?

De la même manière, il est quasi-certain, que Clemenceau qui n’était pourtant pas avare de coups tordus en politique, ne se serait pas livré à ce type de persiflage ou de clabaudage.

L’un et l’autre, en fins lettrés qu’ils étaient, et médusés par l’attaque, se seraient certainement précipités sur un dictionnaire pour tenter de préciser le méfait dont on les aurait accusés. Non pas tant pour élucider la notion d' »emploi » que pour clarifier le qualificatif « fictif »…

Si l’on fait abstraction de la jurisprudence judiciaire, certainement abondante, exubérante, par conséquent contradictoire, selon les sources, et, comme toujours, quasiment incompréhensible, la définition de l’adjectif  » fictif » est assez classique…

 » Le Petit Larousse » précise que « fictif »  est issu du latin « fictus » qui signifie « inventé ». Deux acceptions sont fournies: la première, synonyme d’imaginaire, s’accommode de tout ce qui est créé par l’imagination et qui n’a rien de réel, et la seconde, qui assimile  le mot « fictif » à  » conventionnel », caractérise ce qui n’existe que par convention…

Un exemple permet de mieux saisir la seconde définition :  » Les billets de banque n’ont qu’une valeur fictive »! Cet exemple résonne d’ailleurs étrangement dans le contexte actuel!  Devrait-il nous inciter à déposer une plainte auprès du Parquet national financier contre les banques qui exploitent des billetteries!  On frémit à l’idée qu’en tant qu’utilisateur de ces machines, on s’approvisionne régulièrement en monnaies de singe, autrement dit en argent fictif d’une pension qu’on croyait réelle. Il est vrai, que depuis quelque temps, je nourrissais le vague sentiment que mon pouvoir d’achat se transformait progressivement en une variable d’ajustement réellement décroissante, avant de devenir peut-être un attribut virtuel.

Bref, il résulte de cette recherche documentaire que le caractère « fictif » d’une action est une notion hautement relative, dont on peut user et abuser sans dommage au gré des circonstances!

J’en veux pour preuve ma propre expérience: pendant plus de quarante ans, on m’a rémunéré pour simplement réfléchir, avec pour seule obligation de résultat d’écrire de temps en temps, deux ou trois choses, censées faire date mais que la plupart ont oublié depuis fort longtemps… Personne en revanche n’a osé formuler à aucun moment que mon emploi dans les différentes fonctions que j’ai occupées, pouvait être en partie fictif…Evidemment, tous avaient de bonnes raisons d’éviter ce type de questionnement existentiel, puisque leur situation était identique à la mienne… Réfléchir était donc une occupation en soi, qui devait être rémunérée en conséquence…

L’âge de la retraite ayant sonné, j’ai pensé naïvement qu’il me suffirait – pour m’occuper – de poursuivre mes petites réflexions entamées plusieurs décennies auparavant et, par essence, inachevées. Et surtout, je croyais que mon changement de statut social ne modifierait en rien, la perception qu’auraient les autres de mon activité. Je concevais, qu’à ce titre, on persisterait, au moins moralement, de me créditer d’une activité réelle, sinon utile! Il n’en fut rien.

J’ai rapidement compris qu’on n’attendait plus du tout cela de moi. Et que mon activité d’avant s’était soudainement muée en spéculations hasardeuses de « recopiage ». Un vieil inactif ne peut en toute rigueur espérer exister et retrouver une sorte de crédibilité d’actif que s’il abandonne sa spécificité d’antan – de modeste intellectuel en l’occurrence – et que s’il se précipite avec enthousiasme dans toutes les fonctions domestiques ou de bricolage manuel qu’il avait délaissées autrefois par incompétence, par manque de goût, ou parce qu’il était entièrement mobilisé par son métier…

Poursuivre ces efforts antérieurs et faire partager par l’écriture le fruit de ses petits travaux, devient un non-sens, et n’est plus considéré comme un travail. Ce n’est rien. Ce qui était réel est désormais fictif!

On ne consentira – à la rigueur – à admettre qu’un vieux grigou se livre encore à une activité réelle, au delà de son nécessaire assujettissement – de préférence librement consenti – aux obligations quotidiennes de sa condition d’inactif, que s’il se lance, à corps perdu, dans le bénévolat associatif et l’action caritative… Son travail intellectuel d’antan ne sera plus toléré que comme un aimable violon d’Ingres, dans les temps morts laissés par le mouvement brownien des tâches matérielles incontournables!

« Faire » pour un retraité de classe moyenne ou modeste, c’est produire du mouvement visible, comme si « faire », c’était ne plus « rien faire » d’autre, jusqu’à en perdre la raison…

La conclusion, c’est d’abord qu’il faut conclure, car mon activité en rédigeant ce libelle est, bien sûr, fictive, et ensuite que la frontière entre le réel et la fiction, est d’abord liée à l’observateur…Elle est relative. Là où ça pose problème, c’est quand l’observateur est un juge qui veut se faire mousser, ou un média malveillant!

Ça rappelle quelque chose?

Vive la France, Vive la République…

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Nous ne sommes pas des bêtes, et le renoncement solennel du Président de la République à solliciter un nouveau bail élyséen ne nous laisse pas totalement insensibles…Il s’agit de l’avenir de la France, tout de même! En outre, il y a toujours une part de tragédie humaine dans des « adieux de Fontainebleau » !

Même si on n’est pas fan du zozo, on ne peut que s’incliner respectueusement sur la dépouille politique de celui qui, publiquement, tel un bourgeois de Calais, fait amende honorable – ou presque – avant de se faire symboliquement harakiri.

Le sacrifice de quelqu’un qui préfère partir que de subir l’humiliation d’un congédiement sans appel par le peuple, inspire nécessairement une certaine compassion, même s’il faut comprendre de manière subliminale, à l’écoute de cette ultime homélie électorale que l’intéressé impute d’abord son échec à ceux de ses collaborateurs, des ambitieux sans états d’âme, qu’il a promus aux marches du pouvoir en croyant les neutraliser, et qui l’ont finalement poussé à la faute…Et même peut-être trahi ! Mais, c’est une faute grave pour un chef d’Etat de ne pas savoir qu’on n’est jamais si bien trahi que par les siens !

En revanche, on imagine aisément le désarroi des vieux grognards de la « Hollandie », lorsque, aux alentours de vingt heures quinze de ce « funeste » 1er décembre, ils apprirent la désertion programmée du chef. On imagine le trouble de ces compagnons de route, qui depuis quatre ans, furent à la peine, à la fois les chouchous du régime et des ministres choyés sinon écoutés. On peut penser qu’ils écrasèrent furtivement une larme sur leur destin brisé sous les ors des palais de la République.

Hier encore, ils ferraillaient avec une arrogance « folle », échevelée et blanchie par les ans, pour défendre sans concession le bilan pourtant discutable de leur homme public… Contre toute évidence, ils se fâchaient quand on s’avisait de douter de la pertinence de telle ou telle réforme élyséenne! De même, on imagine l’embarras et même la hargne des jeunes groupies du régime, porte-flingues attitrées du président, au sourire carnassier et enjôleur, qui, sous peu, devront, encore changer de mentor. Sous peu, c’est-à-dire demain, le plus vite possible, sans attendre que ne soient fanées les fleurs de convenance militante, adressées en hommage à la lucidité, à la dignité et au courage de l’infortuné partant, qu’on oubliera bien vite…

L’important, l’urgence même sont désormais de prêter allégeance au nouveau venu (ou à la nouvelle), le « rassembleur de la gauche responsable et moderne « ,  prochainement adoubé par les « primaires » et devenir des fidèles inconditionnel(le)s! C’est là qu’il faut s’appuyer sur son instinct prédateur, car l’erreur de casting peut être fatale… Et dans le même temps, il faut faire fissa pour vanter, avec emphase, les mérites de quelqu’un qu’on aurait vertement critiqué avant-hier et dont on ignorait, jusqu’à aujourd’hui, l’autorité, la force de conviction et les immenses talents… Faire vite, tel est le bréviaire du moment, parce que les soutiens les plus rapides seront les mieux servis et, bien sûr, parce que la défense des « valeurs qui nous sont chères, celles de la République » face à la horde menaçante des ennemis de la démocratie et des acquis de la Résistance, ne saurait souffrir d’aucun délai de carence! Pas plus d’ailleurs que « notre » reconversion dans des conditions honorables !

Bref, nous ne sommes pas des bêtes, sauf à prétendre que l’étrange plaidoyer du Président pour sa propre clairvoyance et la noblesse de ses décisions, se concluant, la gorge nouée, par son renoncement, ne nous a pas émus !

Émus, surtout surpris, car, comme aurait dit mon prof de français au lycée David d’Angers, il y a un demi-siècle:  » Le développement du sujet était assez correct mais semblait en décalage avec la conclusion. » On s’attendait à fêter Austerlitz et on s’est retrouvé sur les bords de la Bérézina ou dans la « morne plaine » de Waterloo, à compter nos abattis !

Tout-à coup, le mécréant que je suis – et que, plus que jamais, je m’honore d’être – s’est mis à penser au Pape Benoît XVI qui, lui aussi, avait décidé en 2013 de « partir du ministère pétrinien » !

Bien que comparaison ne soit jamais raison, je me suis demandé si les motifs de cette « renonciation » pour l’un, et de ce « renoncement » pour l’autre, n’étaient pas de même nature…Sans doute un peu, si l’on en juge par les explications accordées par le souverain pontife émérite au quotidien italien « La Républica » le 24 août 2016, qui font bizarrement écho aux propos du Président de la République Française : « En 2013, il y avait de nombreux engagements que je ne pensais plus être en mesure d’accomplir »…

Manifestement, la situation de François Hollande, dont la sortie médiatique un peu grandiloquente de la compétition politique, peut contribuer – classiquement – à nourrir sa notoriété et sa légende posthumes est assez comparable à celle du pape…Il n’a plus les moyens d’agir et de transformer la société. Sa parole n’est plus entendue comme une vérité, ni écoutée…Pour l’essentiel, il en porte la responsabilité, même si nombreux furent ceux qui lui savonnèrent la planche, en particulier tous ceux bien attentionnés, militants exemplaires de tous les combats du grand soir, qui n’eurent jamais l’audace de porter le regard critique qu’il fallait lorsque l’action gouvernementale dérapait vers plus de pauvreté, plus de précarité, plus d’inégalités et moins de protection pour les plus faibles !

Constats triviaux que tout à chacun peut dresser en sa baladant dans le métro et le RER!

Au fond, tout se passe comme si le chef de l’Etat avait été victime de ses propres godillots, flagorneurs impénitents, comme si les louanges dont ils l’accablaient lui avaient masqué le monde réel.

Cependant, l’heure n’est pas encore au réquisitoire du quinquennat, bien que les sujets ne manquent pas pour étayer la démonstration. Le bilan de son mandat – à charge et à décharge – relèvera sous peu de la compétence des historiens, et rien ne permet de dire qu’il n’en restera rien! Dans le feu de l’actualité et de l’urgence, il est, en tout cas, prématuré d’anticiper sur ce que l’avenir en retiendra en positif ou négatif. Aucune vérité de l’instant n’est absolue.

Je n’aborderai donc ici et pour conclure qu’un seul aspect, la question du chômage, qui incarne à la fois l’échec d’une politique et le double langage qui confine au déni de réalité.

Le discours officiel consiste à se répandre un peu partout en communiquant sur l’inversion – qui serait désormais confirmée et durable – de la courbe du chômage. Qu’en est-il au juste ? Pour le mensuel – numéro 363 de décembre 2016 – « Alternatives Economiques », réputé favorable à la « gauche réformiste » et qui consacre un dossier à l’analyse des résultats, la situation est loin d’être aussi idyllique, voire simplement prometteuse.

S’il est exact – mais à quel prix – que le nombre de chômeurs de catégorie A, c’est-à-dire de ceux qui n’ont pas du tout travaillé dans le mois précédent, a diminué depuis le début de l’année 2016 ( – 35000 entre juillet et septembre), le nombre d’emplois précaires (B,C) ainsi que les emplois aidés (D,E) sans contrepartie de création de richesse, ont continué de fortement augmenter, comme en atteste le graphique ci-dessous…

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Au-delà de ces inquiétantes statistiques qui confèrent ses lettres de noblesse à la précarité tant décriée dans les sections socialistes, chacun « ayant un peu de bouteille » observe l’ampleur des dégradations du tissu social depuis quelques années et la crise morale, identitaire et intellectuelle que connaît notre société.

Le quinquennat Hollande n’est pas le seul en cause. Il n’a tout juste pas su ( ou pas pu) inverser les tendances, et souvent, il les a même accentuées en entretenant l’illusion sur une réalité qui ne correspondait pas à ce que vivait quotidiennement une majorité de nos concitoyens… François Hollande a décidé de jeter l’éponge. C’est bien. Reconnaissons-lui au moins cette objectivité tardive de reconnaître son échec sur de nombreux tableaux ! Pas tous d’ailleurs…Mais, sur la régression de la misère, c’est raté! Ce qui est triste en cette affaire, c’est que le coup de grâce fut porté par un livre à la rédaction duquel la victime elle-même a imprudemment contribué… Document suicidaire à décourager le lecteur le plus assidu …

Heureusement, persiste le souffle de la Commune! « Populisme » crient en cœur les thuriféraires déçus. Il va falloir qu’ils changent de partition.

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Il y a cinq ans, le 4 août 2011, je mettais en ligne un premier billet sur ce blog.

Je venais tout juste de renoncer au passe-droit de travailler. Prenant mes quartiers de vieillesse et délaissant une activité professionnelle qui, en dépit de quelques aléas discutables, m’avait globalement comblé, je faisais valoir mes droits à la retraite. Juste à temps certainement avant que ces fameux « droits » ne se transforment en « privilèges » éhontés aux yeux de cette nouvelle gauche technocrate et bourgeoise, issue des meilleures écoles et pourtant piteuse gestionnaire, qui se pavane depuis quelques années dans les salons dorés de la République.

Salon Pompadour à l'Elysée

         Salon Pompadour à l’Elysée

Dans ce premier message d’une parole (enfin) libérée du « sacro-saint » devoir de réserve, exigé des « petits » pour qu’il la boucle, j’annonçais mes intentions, précisant même, deux jours plus tard – le 6 août 2011 – que mon modèle était un « Livre de Raison » chiné au fin fond de mon Anjou natal. Sa lecture m’avait autrefois ravi et mon ambition, à son exemple, était de ranimer le souvenir de nos grands anciens – voire carrément de les ressusciter – et de contribuer ainsi à sauvegarder une sorte de patrimoine mémoriel qui se dissipe sous les coups de boutoir du temps, amplifiés par la dispersion des jeunes générations loin des berceaux originels de nos familles…

L’entreprise était risquée et sans doute trop ambitieuse, car concurrencée par une actualité prégnante et souvent tragique, qui forcément mobilise les esprits, convoque les émotions et favorise l’instinct grégaire. Dans ces conditions, il reste peu de place pour s’intéresser aux élucubrations oniriques et débridées d’un vieil impertinent ronchon, qui s’agrippe aux idées de sa jeunesse, tel un pleure-misère à son magot! Lequel fesse-mathieu, gardien inflexible d’idéaux d’antan, que plus personne ne semble convoiter, tente, malgré tout, de captiver quelques fidèles en redonnant vie, dans le secret de son cabinet, à des personnages oubliés, « panthéonisés » à sa guise et adoptés pour la circonstance au sein d’une parentèle élargie. Quitte, parfois, pour illustrer son discours, à s’arroger le droit de prêter à ses cobayes à peine exhumés, des intentions qui, dans leurs époques respectives, n’auraient probablement pas pu effleurer leur esprit!

On se défend comme on peut – et souvent de manière dérisoire – pour susciter l’intérêt lorsqu’on se retrouve en concurrence avec les jeux des cirques officiels et les pleurnicheries commémoratives, et que l’on bute sur des chercheurs de Pokémons, jusque sur le perron des mausolées érigés après la Grande Guerre pour rendre hommage aux milliers de soldats sacrifiés ici!

Bref, par les temps qui courent, la tâche n’était pas aisée d’intéresser quiconque – fût-il un lointain cousin – à l’épopée d’une famille à travers les siècles et, au-delà d’elle, de discerner les fondements de notre imaginaire collectif et de notre identité commune…Identité constitutive d’une Nation, dont la seule évocation apparaît aujourd’hui aux tenants du discours « politiquement correct » comme une injure faite aux populations « issues de la diversité »! Et pourtant, c’est tout le contraire ! L’accueil et l’ouverture au monde sont d’autant plus chaleureux et fraternels qu’on ne bafouille pas, honteux d’exister, lorsqu’on nous demande qui on est!

L’exercice mémoriel s’est encore compliqué lorsque, récemment, du fait de l’irresponsabilité de ceux qui prétendent nous guider, le présent et l’avenir sont devenus indéchiffrables et qu’en outre, l’horreur et la sauvagerie se sont invitées à notre table, presque quotidiennement au journal télévisé de vingt heures!

Difficile alors de privilégier la réflexion historique face à la dictature oppressante de l’urgence, à l’écoute de discours régressifs, lénifiants et simplistes, assénés à plus soif pour nous rendre dociles et, finalement, acteurs consentants de notre propre déclin… Exhortations indigestes et stériles d’une oligarchie désemparée,  qui, faute d’autre perspective que le rééquilibrage – serpent de mer – de la comptabilité publique, n’hésite pas à remettre en cause les principes de base d’un Ordre Public pourtant admis par une majorité des citoyens depuis près deux siècles ! Ainsi porta-t’on atteinte sans vergogne à notre art de vivre et même au plaisir de festoyer ensemble…De rire et de ricaner aussi hors des sentiers battus!

Sans parler des reniements, voire des trahisons en rase campagne, perpétrés par ceux qui ont su nous abuser pour conquérir nos suffrages! Sans évoquer non plus la longue liste de nos cruelles désillusions qui ouvrent désormais la voie aux idéologies totalitaires les plus perverses et mortifères et qui réduisent chaque jour un peu plus, nos marges de liberté de pensée et de conscience et – ce qui est plus condamnable encore – qui dénature jusque dans le détail, les concepts cardinaux et fondateurs de notre République…Un des exemples le plus frappant est l’inconvenante promotion des religions dont l’histoire pourrait être prochainement enseignée dans l’école publique, au nom d’une interprétation tendancieuse et détournée de la laïcité… Et l’étrange tolérance à l’intolérance prêchée avec indolence par ceux qui ont été mandatés pour garantir l’application effective de nos valeurs!

Dans ce sombre tableau, constater que, depuis l’inauguration de ce blog, le 4 août 2011, le monde a profondément changé, relève donc de la lapalissade… Et c’est tout simplement être lucide que d’estimer que, faute de vigilance et d’analyse pertinente des forces agissantes, cette mutation extrêmement rapide de notre société risque d’orienter notre avenir vers une forme de fanatisme planétaire qu’on pensait dépassé depuis au moins le Moyen Age! Obscurantisme d’essence religieuse, dont les effets délétères sont accentués par une maîtrise parfaite de moyens sophistiqués de manipulation par les assassins qui se réclament de l’islam originel, véritables fossoyeurs des Lumières et dépourvus de toute forme d’humanité…

Nécessairement, ces bouleversements – dont beaucoup sont inquiétants et dont le terrorisme barbare que nous subissons est l’expression visible et émergée – m’ont conduit, à mon corps défendant, à infléchir mon projet « éditorial » initial, en accordant peut-être moins de place à mon passé familial et en délaissant les cendres de mes ancêtres au profit de cette actualité oppressante et anxiogène. Le devoir d’alerte devient primordial quand la menace est au seuil de nos portes… Certains m’en ont fait reproche ! Beaucoup m’ont suivi dans ce rééquilibrage imposé par la conjoncture…Qu’ils se rassurent tous, je rêve comme eux du jour où des ondes plus calmes permettront de se replonger dans des recherches érudites du passé familial ! Mais pour l’heure, je ne saurais m’affranchir des malheurs qui nous frappent et m’abstenir d’en désigner ceux que je considère comme les responsables directs ou les complices involontaires ou inconséquents…

Voilà mon projet pour les temps qui viennent, sachant que je n’exclus pas, malgré tout, de puiser dans le passé et dans notre histoire des raisons d’espérer…Et elles sont nombreuses!

Pour conclure ce billet – dont l’intitulé doit laisser interrogatifs tous ceux qui n’ont pas abandonné – en cours de route – la lecture de ce billet estival et anniversaire – je souhaite précisément dénoncer une démission – voire une infamie – qui, à mes yeux symbolise, presque de manière caricaturale, la dérive idéologique de cette « gauche moderne » qui n’a même plus conscience d’avoir bradé son âme pour un plat de lentilles et qui, entêtée à éviter toute vaguelette inopportune, ignore, sans complexe et sans nostalgie, sa propre tradition contestataire…L’événement est passé presque inaperçu, opportunément occulté par l’assassinat islamiste des promeneurs du 14 juillet à Nice.

Il s’agit de l’interdiction de chanter « la Chanson de Craonne », édictée par le « sous-ministre des anciens combattants » – avec l’aval probable du ministre cumulard de la Défense et donc de l’ensemble du gouvernement,  lors d’une commémoration officielle de la Grande Guerre, le 1er juillet 2016 à Fricourt dans la Somme !

Venant d’un ministre revendiquant son appartenance à la droite revancharde d’avant-guerre, une telle censure n’aurait étonné personne, car cette chanson rebelle, écrite spontanément par des soldats anonymes, qui exprime le désarroi des poilus de 14-18, et leur refus d’être considérés comme de la « chair à canon » fait aussi le procès du capitalisme qui prospère dans le commerce des armes … On dit qu’elle fut composée à la suite du massacre délibéré de dizaines de milliers de soldats au chemin des Dames en avril 1917 pour complaire à un général Nivelle, méprisant et incompétent, qui voulait à tout prix conquérir quelques ares de terrain…

Le front en France en 14-18

              Le front en France en 14-18

Cette complainte a été très longtemps considérée comme subversive par les « va-t’en guerre » et par les nationalistes de tous poils !  Mais jusqu’à présent la gauche socialiste et communiste n’avait jamais désavoué la révolte de ces pauvres hères, survivants de la boucherie, qui appelaient à la grève des tranchées! Désormais, la preuve est apportée que nous avons changé « d’internationale ». Cette époque où tous les progressistes étaient solidaires de ceux qui souffrent des méfaits de la guerre, est désormais révolue!  Un responsable prétendument de gauche – de surcroît sous-ministre d’un gouvernement « socialiste », sous une présidence « socialiste » a déchiré le voile et fermé définitivement le ban – ou la parenthèse – oubliant que cette chanson fut celle du ralliement des militants de la paix pendant des décennies! Maintenant elle fait peur aux gérants en charge du pouvoir…

Cette mauvaise action qui piétine la mémoire des poilus est cependant « cohérente » avec celles d’un président de la République qui n’hésite pas à décorer de la Légion d’honneur un dignitaire saoudien responsable de la mort de militants des droits de l’homme,  et d’un ministre qui se vante de vendre des armes à travers le monde, y compris aux régimes dictatoriaux les moins recommandables. Mais,  »  business is business ». Chacun sait que le monde de la finance – nouvel ami de nos gouvernants – s’est, de tous temps, réjoui du négoce des armes et des guerres qui l’alimentent. Elles font le bonheur des actionnaires des industries d’armement! Anatole France (1844-1924) ne disait-il pas à bon droit : « On croit mourir pour la Patrie, on meurt pour les industriels« … On pourrait ajouter « ou pour les émirats du Golfe »…

Dans ces conditions, les opposants – même disparus depuis des lustres – demeurent des traîtres: c’est le cas de ces malheureux poilus, auteurs du « Chant de Craonne » dont les paroles persistent près d’un siècle après leur rédaction à choquer la sensibilité de notre délicieux et délicat sous-ministre des anciens combattants…

Les socialistes molettistes de la « première gauche », celle qui prétend défendre les intérêts du pays, n’aiment plus guère les hymnes révolutionnaires, pas plus d’ailleurs que le mot « Révolution » qu’ils prennent pour une vulgarité…

Heureusement notre sous-ministre restera dans l’ombre et ne laissera aucune trace dans notre histoire, ni d’ailleurs dans celle de cette chanson patrimoniale, qui survivra à sa myopie et à son amnésie.

De très nombreux interprètes de talent ont, heureusement assuré la pérennité de la « chanson de Craonne » en la mettant à leur répertoire (Georges Brassens, Jacques Brel, Marc Ogeret, Maxime Le Forestier, Renaud, Léo Ferré, Max Blain, etc.) …

A titre de contrition (puisque la mode est à la religiosité nationale), je me sens obligé en réparation de l’ânerie ministérielle, d’en diffuser le texte…

Charge à ceux qui le liront d’en distinguer les couplets – à ne pas confondre avec des sourates – qui pourraient heurter la sensibilité des gentils énarques de cabinets ministériels et irriter les chastes oreilles de nos gouvernants …

 

Quand au bout d’huit jours, le r’pos terminé,
On va r’prendre les tranchées,
Notre place est si utile
Que sans nous on prend la pile.
Mais c’est bien fini, on en a assez,
Personn’ ne veut plus marcher,
Et le cœur bien gros, comm’ dans un sanglot
On dit adieu aux civ’lots.
Même sans tambour, même sans trompette,
On s’en va là haut en baissant la tête.

Refrain
Adieu la vie, adieu l’amour,
Adieu toutes les femmes.
C’est bien fini, c’est pour toujours,
De cette guerre infâme.
C’est à Craonne, sur le plateau,
Qu’on doit laisser sa peau
Car nous sommes tous condamnés
C’est nous les sacrifiés !

craonne_manuscrite nouveau

C’est malheureux d’voir sur les grands boul’vards
Tous ces gros qui font leur foire ;
Si pour eux la vie est rose,
Pour nous c’est pas la mêm’ chose.
Au lieu de s’cacher, tous ces embusqués,
F’raient mieux d’monter aux tranchées
Pour défendr’ leurs biens, car nous n’avons rien,
Nous autr’s, les pauvr’s purotins.
Tous les camarades sont enterrés là,
Pour défendr’ les biens de ces messieurs-là.

 

Huit jours de tranchées, huit jours de souffrance,

Pourtant on a l’espérance
Que ce soir viendra la r’lève
Que nous attendons sans trêve.
Soudain, dans la nuit et dans le silence,
On voit quelqu’un qui s’avance,
C’est un officier de chasseurs à pied,
Qui vient pour nous remplacer.
Doucement dans l’ombre, sous la pluie qui tombe
Les petits chasseurs vont chercher leurs tombes.

Ceux qu’ont l’pognon, ceux-là r’viendront,
Car c’est pour eux qu’on crève.
Mais c’est fini, car les trouffions
Vont tous se mettre en grève.
Ce s’ra votre tour, messieurs les gros,
De monter sur l’plateau,
Car si vous voulez la guerre,
Payez-la de votre peau !….

 

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Il y a peu, on glosait avec force arguments sur le caractère désuet de nos vieux départements. C’est vrai qu’ils ne datent pas d’hier et qu’ils sont sans doute un peu poussiéreux! Créés par l’Assemblée Constituante en 1790, ils portent néanmoins témoignage d’un passé qui nous relient à nos aïeux. Et ce, d’autant plus, qu’ils figurent parmi les derniers héritages de la Révolution française, parvenus presque intacts jusqu’à nous.

En 2012, pourtant, ceux qui, fringants, venaient d’accéder au pouvoir les poches pleines de promesses, semblaient vouloir en faire leur deuil. C’est tout juste s’ils ne déversaient pas l’anathème sur ces vestiges des administrations territoriales d’antan, qui, selon eux, n’avaient plus vraiment de raison d’être à l’heure de la mondialisation tous azimuts. Des communications aux transports en passant par la Finance – alors considérée comme l’ennemie principale – ces néo-molettistes étaient convaincus que la révolution numérique était en marche et qu’elle balaierait tout. Par conséquent, l’espace politique des structures imposées par l’histoire, y compris celui dévolu à la gestion de la vie locale, devait nécessairement se réduire comme peau de chagrin !  C’était la vérité d’il y a environ deux ou trois ans!

Internet et ses réseaux sociaux constituaient alors aux yeux de ces modernes élites, l’Univers virtuel à portée de clavier, d’où émergerait une nouvelle démocratie de « proximité » qui remplacerait avantageusement celle bituminée et chaotique des voies départementales convergeant vers les chefs-lieu de canton ou d’arrondissement. En outre, cette fine fleur de la haute technocratie parisienne ( c’est-à-dire faussement provinciale) se répandait un peu partout avec des trémolos dans le discours, en affirmant qu’un des handicaps majeurs de la France résidait dans la complexité de son organisation administrative et la multiplicité de ses échelons décisionnels. Un mille-feuilles désordonné, où chaque administration, territoriale ou d’Etat, se croyant seule dépositaire et garante du service public, épuiserait ses forces à concurrencer ses rivales et à se cloisonner dans une réglementation inextricable pour le commun des mortels. Un contexte dans lequel les « élus du peuple », pour la plupart cumulards spatio-temporels et relais autoproclamés des aspirations populaires, souffraient de schizophrénie, contraints de défendre le jour, comme gestionnaires des « territoires » ce qu’ils contredisaient le soir comme parlementaires « hantés » par l’intérêt supérieur de la Nation. Et, pendant ce temps, les services respectifs placés sous leur autorité se marchaient sur les pieds et alourdissaient les procédures…

Forts et fiers de ce constat dont ils firent un de leurs chevaux de bataille, nos « frais émoulus » dirigeants s’érigèrent dès 2012 en critiques sévères, parfois cruels de l’organisation territoriale française. Tels les députés de la noblesse lors de la nuit du 4 août 1789, qui se firent hara-kiri dans l’enthousiasme général en jetant par-dessus bord l’ensemble de leurs privilèges,  ils se promirent de faire la peau aux conseils généraux dans le cadre d’une grande loi de simplification et d’aménagement du Territoire.

Dans un premier temps, ce mouvement vers la réforme fut salué sans réserve par tous les godillots. Avec un certain masochisme d’ailleurs, à moins que ce fut avec une certaine dose d’inconscience, car beaucoup feignirent d’oublier que dans de nombreux cas, ce furent précisément ces conseils généraux, qui leur firent gravir l’échelle sociale et qui leur permirent de vivre confortablement avant d’atteindre les sommets. On omet trop fréquemment de rappeler le rôle d’incubateur de carriéristes que jouèrent de tout temps les Conseils généraux. Et en particulier de tous ces petits élus médiateurs complaisants et dociles, entre la population et le pouvoir!

C’est au sein des Conseils généraux, en particulier, qu’ils apprirent à serrer les paluches sur les marchés dominicaux, seule activité politique que pour la plupart, ils exercèrent avec talent et avec une autonomie relative, car, pour le reste, il leur suffisait de se lover frileusement dans une discipline républicaine quasi-contractuelle, et de voter comme il faut – c’est-à-dire comme on leur disait -dans les différentes commissions ou instances plénières desdits Conseils. Lesquels, en contrepartie, leur octroyaient reconnaissance, gite et couvert! Et pour les plus bavards, un bel avenir.

Et voilà que, mue par une sorte de lucidité aussi subite que mortifère, la majorité parlementaire de 2012 se mit – comme un seul homme – à dénoncer l’inutilité, voire la perversion coûteuse du « mille-feuille » administratif. Non sans quelque motif d’ailleurs, car il n’est pas faux de prétendre qu’au fil du temps et au gré des intérêts subalternes de politiciens prétentieux de toutes les générations, de nombreuses « institutions » territoriales ont été créées, dotées de compétences et d’attributions redondantes et inutilement cumulatives. Au demeurant, elles sont généralement sans réel pouvoir – hormis celui de lever des impôts – car l’Etat central a toujours veillé à limiter leurs prérogatives tout en affirmant le contraire.

A se demander même, si dans ce jeu de rôle, l’Etat n’a pas tout simplement cherché à brouiller les missions – voire à les compliquer à dessein – pour maintenir en situation de sujétion tous ces petits féodaux, qu’il avait lui-même adoubées. On ne sait jamais, de César à Giscard, nombreux sont ceux qui constatèrent à leur dépens que ceux qu’on a nourris en son sein se retournent contre soi. Devenant démesurément ambitieux, ils pourraient se rebeller, pensant à tort, avoir vocation à être ce qu’ils ne sont pas, à savoir des vrais chefs. Pour pallier ce détestable penchant, l’Etat jacobin, non démenti – et même conforté – par la Constitution de la cinquième République, a toujours rêvé de transformer les élus locaux en honnêtes fonctionnaires, tout en entretenant la fiction de leur autonomie et en vantant les mérites d’une décentralisation, qui au mieux se limite à une déconcentration sous surveillance préfectorale! Simple constat que chacun peut dresser, mais, qui, au demeurant ne me hérisse pas outrageusement.

Ce sont en tout cas dans ces conditions, que les nouveaux convertis au « choc de simplification », encore soucieux d’appliquer le programme qu’ils avaient annoncé lors de leur élection, en étaient à envisager, dans un stupéfiant mouvement d’aggiornamento, la suppression de la notion même de département! Cette audace pouvait néanmoins surprendre de la part de ces besogneux tenants du « camp du progrès » généralement plus prompts à renier leurs engagement de campagne qu’à innover au-delà des vieilles rengaines sociales-démocrates. L’expérience a en effet constamment montré que, lorsqu’ils parviennent au pouvoir, leur timidité conservatrice l’emporte sur leurs intentions de transformation sociale. L’important devient la sécurisation des positions et des prébendes. Chacun peut observer qu’il s’empressent alors de sauvegarder de fragiles équilibres politiciens en invoquant hypocritement des valeurs « universelles » dont la géométrie varie au gré des inclinations idéologiques de leurs soutiens de toutes observances … Il n’y a guère que dans l’art de la compassion larmoyante, attribut dramatique de tout pouvoir face à la mort, où ils excellèrent à leur corps défendant. Force est de reconnaître qu’ils l’exercèrent avec humanité, poussés trop souvent, par une actualité cruelle et tragique.

Bref, l’audace annoncée de la réforme territoriale stupéfia tout le monde, tant par son contenu que par la personnalité de ceux qui la portaient. On ne les pensait pas si téméraires! Du sommet de l’Etat aux strates militantes les plus modestes, tous affirmèrent qu’il était urgent d’agir pour restaurer la compétitivité du pays, diminuer le déficit public, et à cette fin, réduire de manière drastique l’imbroglio administratif, source de dépenses dispendieuses et inconsidérées. Pour des motifs d’efficacité de l’action administrative et d’économie des moyens, la consigne était de supprimer les doublons de missions entre l’Etat central et les structures territoriales, qualifiés globalement d’obèses. Dans cette perspective, les départements étaient clairement montrés du doigt comme le type même de résurgences passéistes à supprimer, en transférant leurs attributions vers d’autres entités territoriales plus vastes ou vers les communes qui étaient elles-mêmes sommées de se regrouper…

Tel était l’enjeu de la réforme territoriale annoncée, qui visait aussi les régions administratives – et dont on disait qu’elle avait pour but ultime de restaurer la capacité de la France à affronter un environnement mondial sans concession, où la loi des marchés financiers et de la concurrence s’imposait à tous. Et par là, de permettre, à la « patrie des droits de l’homme » de tenir son rang!

mars 2015 Photo JLP

mars 2015 Photo JLP

La réforme était sur les rails, n’en déplaisent aux nostalgiques de la République des professeurs, qui persistaient à vouer un culte aux départements glorifiés dans le « Tour de la France par deux enfants », lu et relu dans toutes les écoles primaires de France du début du siècle dernier. Adieu donc l’autonomie et la spécificité des départements!

Mais c’était sans compter l’action corporatiste, efficiente et énergique des notables locaux de tous bords politiques, qui, voyant s’évanouir un de leurs fromages, se mobilisèrent pour détourner la réforme de son objectif initial, l’affadir et même, si possible, l’annuler. Des plus « frondeurs » ou plus soumis, tous se mirent  à exercer un lobbying insensé destiné à faire plier un gouvernement affaibli et largement décrédibilisé auprès de l’opinion publique, par ses multiples renoncements et par ses pronostics fantaisistes. Personne n’eut alors de mots assez forts pour vanter les vertus et l’importance primordiale des Conseils généraux, qu’on pensait moribonds quelques mois auparavant. Et se multiplièrent les hommages à la démocratie de proximité qu’ils étaient soudainement censés incarner. Dire qu’on ne s’en était pas aperçu!

Mieux même, certains conseillers généraux jusqu’alors inconnus des citoyens, éditèrent des compte-rendu de mandat, qu’ils avaient jusqu’alors omis de produire! D’autres allèrent jusqu’à s’inquiéter publiquement du devenir de « l’aide sociale légale » versée par les départements, de l’entretien futur des routes qui serait fragilisé, ou du maintien des subventions aux initiatives associatives culturelles ou caritatives, « si importante pour restaurer le tissu social », etc.

Si le projet avait abouti, le monde se serait sûrement écroulé et on en serait certainement revenu aux chemins creux des campagnes d’antan, et aux charrettes à bras pour les transports scolaires!  Face à un tel déploiement de contestations et de mauvaise foi, le pouvoir – comme toujours – a cédé et a reporté sa volonté de changement aux calendes grecques.  Le changement n’est décidément plus pour maintenant, à supposer qu’il ait lieu un jour!

Mais pour ne pas perdre totalement la face, les cerveaux élyséens ont imaginé des changements d’appellation : les conseils généraux sont devenus des « conseils départementaux » . Et le nombre de canton a été réduit de moitié, chacun étant désormais représenté par un binôme homme-femme, dans le souci d’instaurer une gouvernance départementale strictement paritaire! Le pouvoir, impuissant à transformer le réel sur le fondement du triptyque républicain, aime à se gorger de symboles et à les traduire dans pléthores de dispositions législatives. En l’occurrence, il s’agit d’une authentique innovation, puisqu’elle exige de l’électeur qu’il choisisse un homme et une femme, et non plus un citoyen de sexe indifférent. On ne se contente plus comme autrefois – de « favoriser l’égal accès des femmes et des hommes » aux mandats électoraux comme le stipule le préambule de la Constitution, mais de l’imposer…

Evidemment ces dispositions, pour pertinentes qu’éventuellement elles soient, sont sans rapport avec l’intention initiale de simplifier et d’économiser l’argent public: certains prétendent même qu’elles aboutiront à des résultats inverses… Croisons les doigts!

Cette réformette qui intervient un peu comme un fusil à tirer dans les coins pour des chasseurs malvoyants, est en outre amputée d’un aspect important : la définition des missions qui seront confiées aux futurs « conseillers départementaux », qui dort encore dans les cartons ministériels. Elles ne seront dévoilées, le cas échéant, qu’après leur élection.

Dommage, car dans ces conditions, le citoyen est appeler à désigner des élus locaux, dont ils ignorent le périmètre du futur mandat!  Finalement le suffrage populaire revient en la circonstance à choisir des responsables administratifs, disons, des « chefs de bureau d’administration territoriale » . Difficile dans ce contexte, de discerner dans le scrutin un enjeu politique local! D’où la tentation de le transformer étrangement et paradoxalement en un enjeu national.

Pour les dirigeants nationaux, bousculés par leurs médiocres résultats, leurs dénis de réalité et leurs revirements incessants, la tentation fut alors grande de dramatiser la situation en brandissant le spectre du fascisme, de la lutte contre le racisme et en sonnant le tocsin de la patrie en danger et des clairons des soldats de l’an 2! En gros, de nationaliser les « départementales » avec des variantes locales agressives pour discréditer les adversaires. Face à ce dilemme, les camarades n’hésitèrent pas longtemps, et c’est ainsi que l’on a vu des ministres distribuer des tracts à la sortie des RER pour regonfler le moral des pieux militants, incrédules une heure avant! Cela suffira-t-il à sauver, non  pas une République qui n’est pas si vacillante qu’on le prétend, mais une majorité oublieuse de son identité et de ses engagements? On verra…

Rien n’est perdu, fors l’honneur!

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Dans quelques jours, à l’occasion du 11 novembre, le président de la République, tout cabossé par ses exécrables sondages d’opinions va ouvrir officiellement l’année de célébrations de la guerre de 1914-1918.

Ce sera grandiose sans doute, mais est-ce que ça suffira à « sauver le soldat H », tout suturé et déjà passablement couvert de pansements? D’ailleurs, est-il opportun de lui porter secours en lui passant une « galletouse » et un verre de gnôle ? Dans le jargon des tranchées, on l’aurait appelé « un baluchard », voire, improprement, un « pantruchard » et plus « justement » un « édenté » !

Disons qu’il a vraiment la poisse, le mec ! Il semble rater à peu près tout ce qu’il entame; il brise tout ce qu’il touche, mal secondé par « les bras cassés » qui l’entourent et le cajolent. Même la pluie l’accable dès qu’il pointe son nez dehors. Et ça fait du baroufle !  Tout fout le camp, à commencer par l’espoir qu’il avait suscité, de subjuguer Berlin, la fleur au fusil avec ses « poteaux » en bois de pipeaux. Vite fait, bien fait! Non mais! Manque de bol, la grosse Bertha peu sentimentale n’a pas marché dans la combine. L’air « dingo » du soldat H ne l’a pas séduite et elle se fiche comme d’une guigne de nos « machines à découdre », de nos « Charles Humbert », de nos « trains de permissionnaires » et de nos « calendriers ».

Bref tout part en quenouille… en C…!

Mais c’est pas parce que le gars est « ballot » et qu’il a la scoumoune, que c’est nécessairement un mauvais bougre. C’est pas parce qu’il est « loin du ciel » et qu’il a troqué la « gueule d’empeigne » ou le « traquet » de son prédécesseur pour une « gueule cassée » dont ses amis – plus que ses ennemis – se sont évertués à l’affubler, qu’il doit nécessairement passer pour un « louftingue » ou une « vieille noix » et qu’il ne finira pas par « débocher les pékins » en gagnant au moins une petite bataille. Une seule pour faire mentir les « baveux ». Par exemple celle de la mémoire, sinon celle de l’avenir. Au moins, à la tranchée des baïonnettes, seul sur la tribune, le vent s’engouffrant dans les trois poils teintés tristement alopéciques, on ne lui reprochera pas l’air mauvais de sa « mistone» que tout le monde assimile à une « ménesse » tout juste bonne pour la « quenaupe » !  Moi je ne la critique pas la rombière : elle est angevine…

Il faut donc sauver « le soldat H », faute de mieux !  En dépit de son côté « petzouille », l’homme est brave surtout quand « il y a la gauche » ! Pas grave finalement qu’il ne soit pas « au poil » …

Vive la France éternelle

Ramper, cisailler et déminer

Ramper, cisailler et déminer

PS:   Vocabulaire des poilus:

  • Baluchard: homme peu dégourdi
  • Pantruchard : parisien
  • Edenté: père de quatre enfants au moins
  • Poteau : ami
  • Dingo: Homme benêt
  • Machines à découdre: mitrailleuse
  • Charles Humbert : Obus français de 280
  • Train de permissionnaires: Obus de 305
  • Calendrier: Grenade à mains
  • Loin du ciel: petit
  • Débocher les pékins: tranquilliser les civils
  • Vieille noix : homme ennuyeux et ennuyant
  • Traquet : sorte de crécelle, moulin à parole
  • Ménesse: femme quelconque
  • Quénaupe: pipe
  • « Il n’y a plus de gauche » : expression signifiant en langage poilu – et seulement en langage des tranchées – qu’il n’y a plus de danger

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Dans ce blog, je m’abstiens généralement de faire état de mes convictions républicaines et laïques: d’une part parce que ce n’est pas mon propos ici, d’autre part parce que, trop nombreux sont ceux qui actuellement se réclament de la République souvent en la malmenant ou en ignorant ses principes, et enfin parce que, parmi les internautes qui me font l’honneur de me lire, il y a peut-être des royalistes ou d’autres qui n’aiment pas les républiques laïques ! (Je ne veux mécontenter personne)

Parfois, j’ai l’impression que le webmaster du Portail du grand opérateur public Orange appartient à cette dernière catégorie ou qu’il ignore ce que signifient les mots « laïcité et liberté de pensée », car je suis régulièrement censuré dans mes commentaires à propos d’articles mis en ligne sur le Portail Orange…

Aussi, à chaque censure, je publie moi-même mon commentaire refusé dans une rubrique de ce blog, intitulée « angevinades ». Ainsi chacun peut juger que je ne contreviens jamais à la loi sur les publications, que je n’use jamais d’injures ou de grossièretés pour étayer une démonstration ou argumenter une position, et qu’enfin on ne trouvera jamais de connotation pornographique, xénophobe ou raciste dans mes écrits. Pas plus d’ailleurs que dans mes paroles ou dans mes comportements, car ces perversions et ces dérives me font, non seulement horreur, mais en outre, elles sont, selon moi, des insultes à l’intelligence humaine et à la rationalité. Rationalité cartésienne dont je n’ai pas honte de me réclamer…De même que j’assume sans complexe l’ironie et le persiflage voltairiens, que ne semble guère apprécier l’inculte censeur.

N’empêche que le webmaster d’Orange s’obstine à me censurer. En particulier aujourd’hui-même, où en réaction à un article intitulé « Hollande en visite éclair sur ses terres corréziennes en pleine affaire Cahuzac », je m’étais permis d’adresser le commentaire suivant après avoir lu que le président allait consacrer la fin de son weekend à la réflexion:

« Conseil et rappel …

En République laïque, c’est la loi qui incarne l’intérêt général. Rien qu’elle! Inutile donc et probablement dangereux d’invoquer la « moralisation » de la vie politique, alors que la seule chose qui compte, c’est d’appliquer la loi et de la faire appliquer avec rigueur.

L’invocation de la morale n’est pas du ressort de notre pacte républicain, mais de la pensée religieuse… Autrement dit, s’il faut sanctionner sans faille les contrevenants aux règles démocratiquement édictées, ce serait renier nos principes que de se mettre à légiférer sur le mensonge, le parjure, la charité, la gourmandise et d’inscrire les péchés capitaux dans notre Constitution … Attention: restons laïcs en matière d’affaires publiques! »

Ce « conseil et ce rappel » n’étaient évidemment pas adressés prioritairement au Président de la République dont je ne doute pas un instant qu’il partage ce point de vue, mais à tous ceux, commentateurs médiatiques ou politiques de tous poils, qui actuellement se dédouanent (si j’ose dire) de leurs propres turpitudes en invoquant à tout bout de champ la « morale » ! … Et en tapant à bras raccourcis, avec une touchante et suspecte unanimité, sur le mouton noir menteur. L’unique mouton noir, celui qui avait trompé tout son monde, y compris le naïf berger et son aide !

Si l’«ordre public » républicain doit effectivement rendre compte d’une conception collective de la morale ainsi que des us et coutumes, tels qu’ils sont admis à un instant donné, pour maintenir la cohésion de la société,  son incarnation ne se trouve que dans la loi et non dans des catéchismes qu’il faudrait rendre obligatoires. En outre,  cet « ordre » ne doit en aucun cas interférer avec la sphère privée, sauf lorsque sa transgression porte atteinte à toute la collectivité. Sinon remplaçons les policiers par des curés, des muftis ou des rabbins de toutes obédiences, et les commissariats par des lieux de prière ou de repentance !

Il faudra rappeler ces sages principes de laïcité au webmaster d’Orange, qui, en revanche, n’est pas très regardant sur l’orthographe et sur la syntaxe ! En cela, il témoigne de la panne de l’ascenseur social qu’était autrefois l’éducation nationale.

Je prie ceux de mes lecteurs qui préfèrent mes chroniques du passé à ce cri de colère « républicaine » de bien vouloir me pardonner : je fais d’ores et déjà acte de contrition et je reviendrai prochainement à mes éternelles amours…

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Il y a des jours où l’injustice flagrante dont on se sait victime, fait douter de l’humanité et de la civilisation. On finirait presque, comme lors des procès de Moscou sous Staline, à présenter soi-même sa tête au bourreau… pour avoir enfin la paix. J’espère que ce ne sera pas le cas aujourd’hui, mais l’expérience rend prudent … Les technologies de communication sont devenues si sophistiquées et efficaces, qu’elles peuvent inonder le monde de calomnies, de diffamations et de contrevérités, à la seule fin de détruire des personnes arbitrairement désignées à la vindicte populaire comme des « coupables » à abattre. Sans avoir l’excuse du félin, mais en prétextant des nécessités douteuses d’ordre public, on aime jouer avec les « sacrifiés » avant de les tuer. Ces pratiques peuvent à la longue, se révéler mortifères, pour ceux qui ont le malheur de se trouver par hasard dans le collimateur des « redresseurs de tort d’opérette » et de les subir. Car, quoi de plus éprouvant que d’être accusé à tort ? Qui y-a-t-il de pire que de constater à l’issue d’un parcours professionnel de devoir et de conviction, dont on devrait se prévaloir avec fierté et que la méchanceté ou la bêtise s’évertuent à dénaturer et à salir. Ces dérives constituent sans doute la part d’ombre de la condition humaine. En tout cas, c’est indiscutablement la revanche de la médiocrité. Elles gangrènent les sociétés depuis toujours, mais aujourd’hui, leurs conséquences sur les individus honteusement « éreintés » sont plus lourdes qu’autrefois, et irrémédiables,  du fait de la médiatisation immédiate et universelle de tout évènement susceptible de mettre en valeur ceux qui s’échinent à détruire des réputations pour en tirer avantage. La mise au pilori sans la moindre preuve et la dénonciation publique sont devenues un sport national, y compris de la part de ceux qui,  en raison de leur fonction, devraient faire preuve de mesure, de retenue et surtout d’impartialité ! Honni soi qui mal y(e) pense! On fait fi avec délice de l’honneur de ceux qu’on veut abattre pour le seul plaisir de « paraître » et sans autre justification que de masquer sa propre incompétence ou sa paresse (intellectuelle) ! Sans parler de l’indécence  des médiocres journaleux, écrivaillons inventeurs de fables nauséabondes, seulement destinées à fabriquer de faux coupables pour satisfaire leur égo  surdimensionné de prétendus chevaliers blancs! Pauvre justice prise en otage par ces mystificateurs!

Il faut vraiment lire et relire Sénèque avec une obstination confiante pour se convaincre que le « sage est inaccessible à l’injure » ou « à l’offense » lorsqu’on entend au petit matin des commentateurs déchaînés,  prétendument journalistes ou reporters, hurler avec les loups – car c’est dans l’air du temps -sans procéder à la moindre vérification préalable, sans rien connaître des sujets sur lesquels ils glosent. Il faut vraiment être « blindé » pour lire sans broncher les propos malveillants et sans le moindre fondement, des « beaufs » qui se défoulent sur le Net.  Il faut se cramponner avec acharnement à la philosophie des grands anciens sur la manière la plus élevée de se comporter dans l’adversité lorsqu’on voit ou qu’on entend, à longueur d’informations, d’ignobles déclarations de manipulateurs d’opinions qui ne recherchent que leur propre gloire en se servant de la souffrance et du malheur des vraies victimes …

L’actualité est riche mais parfois inquiétante pour l’esprit des Lumières ! Je crains que le sort des penseurs libres – disons tout simplement de ceux qui réfléchissent en toute liberté – est sur le point d’être gravement compromis. Ce fut le cas récemment lorsqu’on vit une ministre de l’écologie en exercice, dont la notoriété ne repose  évidemment pas sur l’audace ou le nombre de ses publications scientifiques  – ce qui,  au demeurant, n’est en rien blâmable – se croire autorisée par sa fonction à brandir « un carton rouge » à l’adresse de l’Académie des Sciences, au motif que cette dernière aurait organisé un débat entre climatosceptiques « tendance Allègre ».  Quoiqu’on pense de la pertinence des thèses et des arguments de ce grand géochimiste, on ne peut être qu’accablé par de tels propos émanant d’une responsable politique de premier plan, qui semble considérer que seuls ceux qui pensent conformément aux théories scientifiques actuelles sur l’évolution du climat, ont  droit de cité à l’Académie des Sciences. C’est ignorer la longue quête de l’homme dans l’acquisition des savoirs, et surtout c’est la négation même de la démarche scientifique fondée sur le doute méthodique et sur le débat scientifique contradictoire. Le plus rageant c’est que le pouvoir en place se dit démocrate, car si l’on a déjà connu de pareilles dérives épistémologiques dans l’histoire du monde, c’était plutôt sous des dictatures.

Que faire, face à cette avalanche de mauvais signes de « bien pensance »  ou d’escroquerie morale, au nom desquels on a d’abord colonisé l’histoire, puis muselé les sciences sociales, et maintenant les disciplines scientifiques? Ça fleure bon le rétablissement du délit d’opinion, voire du délit de penser. Que faire alors que, concomitamment, on « judiciarise » à tout crin la société et qu’on parvient presque à demander de sanctionner toute déviance intellectuelle ?  Et ce, évidemment, au détriment des principes mêmes du droit pénal !

Pour s’en sortir, si l’on écarte l’idée du suicide par la ciguë, trop anachronique, il ne reste que l’ivresse de l’alcool  pour les vieux dans mon genre, un peu las de se battre contre des moulins à vent… ou la lecture nostalgique de poèmes ou des conseils roboratifs de mon ami persan du 11ème siècle Omar Khayyâm :

«  Le vin est défendu, mais tout dépend en somme

« De celui qui le boit, du vin que l’on consomme

« Et des autres buveurs avec qui l’on partage…

« Ces trois points satisfaits, qui boit sinon le sage ? »

Je vais donc boire, par goût du risque de m’enivrer avec ceux qui liront ce billet. En faisant un bras d’honneur à tous les horrifiés du risque « zéro » pisse-froid qui nous promettent mille maux et qui, bientôt, pour notre bien, rendront obligatoires les alcooltests dans nos chambres à coucher !

Mais je vais innover en ravivant encore une fois le passé des miens.

Ma mère raconte volontiers que sa mère, Adrienne Venault (1894-1973) préparait les jours de grande chaleur à Angers dans les années trente ou quarante du siècle dernier, une préparation rafraîchissante spécifique des régions de l’Ouest et tout particulièrement de l’Anjou : la « bijane ».  A l’origine, cette sorte de soupe « sucrée » composée d’un mélange de pain rustique et de vin rouge était plutôt consommée les soirs d’été au retour des travaux des champs dans les dans les campagnes angevines, mais les citadins d’Angers, pour la plupart, anciens ruraux l’avaient également adoptée.  Parfois, les moins fortunés ou les plus « radins » la coupaient d’un peu d’eau pour économiser le vin. Pas trop tout de même pour ne pas la dénaturer et y conserver un peu du piquant du vin, qui le plus souvent était une « piquette », mais qui pouvaient aussi être des «blancs du Layon ».

Dans un premier temps, je vais donc tenter la « bijane » pour conjurer la bêtise en cultivant le souvenir des anciens sans toutefois la couper d’eau de Lourdes, comme, une fois, ma grand-mère l’aurait fait par mégarde! Quoique que je n’aie rien contre un petit miracle par-ci par-là ! Surtout en ce moment ! Un miracle de la raison, de préférence…

Je pourrais être aussi tenté par la « mominette » que mon arrière-grand-père Joseph Cailletreau (1859-1946) sirotait épisodiquement en guise d’apéro dans les troquets du Lion d’Angers au début du siècle dernier… Là, il s’agissait d’un breuvage, un spiritueux, l’absinthe. C’était plus corsé que la bijane mais sûrement moins que le « pastis », car la « mominette » par définition était généralement consommée en tout petit verre, du moins en Anjou.

Cette boisson fut par la suite accusée de rendre fou ses consommateurs et fut interdite en 1915. Mais manifestement, la prohibition ne fut pas appliquée avec la même rigueur dans toutes les campagnes, car Pépé Cailletreau qui ne lisait que très rarement le JO, faute tout bonnement, de savoir lire, en buvait encore dans les années trente! Il semble que cette interdiction fut prononcée à tort car elle fut levée en 2011, sous réserve que le taux de thuyone dans la plante d’absinthe, soit inférieur à une certaine limite d’acceptabilité. Je ne doute pas qu’un jour, un juge zélé mais besogneux, en mal de notoriété et compensant son manque d’imagination par l’accumulation fantasmagorique de milliers de photocopies « accusatrices » aux frais du contribuable découvre que l’alcool est dangereux. Je suis certain qu’il accusera les pouvoirs publics d’avoir négligé cette propriété et je  suis prêt à parier qu’il cherchera des noises aux modernes lampistes administratifs, rédacteurs de la récente autorisation en les accusant d’être sous l’influence alcoolique du lobby international des fabricants d’absinthe !

Quoiqu’il en soit des manœuvres judiciaires sélectives, mon arrière-grand-père Joseph avait sûrement besoin d’un petit remontant quand il revenait du cimetière, où comme fossoyeur occasionnel de la commune, il avait enterré un copain. En particulier lorsque, un jour de canicule, il avait dû s’attaquer avec sa pioche émoussée à la dureté de la terre schisteuse de l’Anjou.

Moi, l’absinthe me serait utile pour enterrer mes illusions de jeunesse.

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Sur le Portail « Orange », sont publiées des actualités que chaque internaute peut en principe commenter au travers de ce qui est appelé un « Journal de réactions ». Ces réactions ne sont mises en ligne qu’après avoir été lues (et validées) par une « équipe de modération ». Cette dernière a pour mission de veiller à ce que les messages des internautes respectent la loi et certaines règles élémentaires de courtoisie et de bonnes mœurs. En particulier, ces messages ne doivent être ni injurieux, ni racistes, ni pédophiles ou pornographiques, etc.  Rien qui ne soit prohibé par la loi ne doit être diffusé et c’est légitime…

Mais désormais, l’équipe de  modération semble aller plus loin, car elle sanctionne – c’est-à-dire censure – l’ironie, dès lors qu’elle n’est pas en adéquation avec le politiquement correct médiatique. Aucune thèse contraire au discours dominant du moment ne doit sans doute être développée.

Ainsi, en réaction à un article publié sur le portail « Orange »ce jour à 8h24 et  intitulé : « Le tweet de Trierweiler: « règlement de comptes » et « couac » pour Hollande, pour la presse », j’ai tenté vainement de mettre en ligne le commentaire suivant :

 «   Angevinades au sommet

L’angevine Trierweiler et Royal la néo-poitevine se crêpent les chignons! L’enjeu est de taille: un corrézien d’adoption devenu président de la République. Et lui, normand d’origine hésite: « Peut-être bien que oui ou peut-être bien que non! » ou encore: « Je me débarrasserais volontiers de l’Ex en faisant semblant de la soutenir et j’approuve ma nouvelle, tout en la désavouant implicitement ».

C’est vrai qu’au perchoir de l’Assemblée, l’Ex risque d’être plus embarrassante qu’utile, et la faire battre « démocratiquement » est un bon moyen de régler le problème sans avoir à l’affronter. La stratégie est subtile et ça peut fonctionner, à condition toutefois de ne pas se faire prendre la main dans le sac et de ne pas se retrouver prisonnier de son stratagème. Un stratagème en forme de muse omniprésente. Conclusion : N’est pas Machiavel qui veut! En outre, le temps des monarchies est révolu, comme celui des comtes d’Anjou… »

Ce commentaire a été censuré par l’équipe de modération d’Orange. Je suppose que dans la patrie des droits de l’homme et de la liberté d’expression, il est devenu indécent de pratiquer l’ironie ou le persiflage et de comparer un président de la République à un Machiavel normand néo corrézien ! Et dire que, pour moi, c’était un compliment…

J’imagine les « sages » de l’équipe de modération, lecteurs au premier degré de mon modeste libelle, justifier leur censure en estimant qu’il heurte la sensibilité normande, corrézienne, angevine et poitevine et qu’il incite à la haine provinciale …Si tel était le cas, je prie mes compatriotes des anciennes provinces de bien vouloir m’excuser …

Aux membres de l’équipe de modération d’Orange, j’adresse une sonore et rigolarde interpellation : « Pas très glorieux les gars ! »

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Quelques minutes avant l’annonce des résultats aux élections présidentielles 2012, j’achevais la lecture d’un ouvrage de Jean-Pierre Luminet, « La Perruque de Newton », une magnifique et puissante biographie d’Isaac Newton (1642-1727). Mais en refermant ce roman fortement charpenté et documenté, j’étais pensif, presque ébranlé, car celui qui fut un de mes modèles de pensée au cours de mes études de physique sur les bancs des facultés des Sciences de Nantes ou d’Orsay à la charnière des années 60 et 70, était, semble t-il, un type humainement discutable voire carrément détestable. Ce savant dont les travaux de recherche, la capacité d’abstraction et l’aptitude à expliquer ont probablement surpassé les intuitions géniales d’un Galilée, d’un Kepler voire d’un Descartes, n’aurait été qu’un petit bonhomme atrabilaire et mesquin.

Ce visionnaire qui a révolutionné notre conception du monde et du cosmos, deux siècles avant Einstein, et qui, avec sa théorie de la gravitation universelle, a fourni une explication viable du mouvement des étoiles et des planètes n’aurait été, en plusieurs circonstances, qu’un petit escroc de la science, s’appropriant des résultats d’autrui et s’en attribuant la paternité ! Passé cet instant de stupeur – et même de dépit amoureux à l’égard d’une idole déchue – j’en suis revenu à des sentiments plus modérés : les défauts de Newton  ne sont finalement que la marque de la condition humaine- de son humanité. Le chercheur qu’il fut, demeure le génie que nous imaginions, précisément parce qu’il est traversé des mêmes pulsions que nous et qu’il succombe aux mêmes faiblesses. Simplement, il est descendu de l’Olympe. Et c’est bien ainsi, car, en dépit de ses défauts, de ses vices, de sa misanthropie et de son égoïsme, Newton demeure un maitre dans la recherche de l’universel. Son héritage, c’est son œuvre scientifique. C’est sur elle et sur rien d’autre, que doit porter le jugement de la postérité. 

J’en étais là de mes réflexions lorsque Nicolas Sarkozy est apparu à la télévision commentant sa défaite devant ses partisans réunis au palais de la Mutualité à Paris. Je n’ai aucune complaisance à son égard. Il ne fut pas mon candidat et je n’ai pas aimé son style de gouvernance de la France pendant cinq ans. Mais je dois reconnaitre, qu’hier soir, son intervention qualifiée de « digne » même par les Excellences et dignitaires socialistes patentés présents sur le plateau d’Antenne 2, m’a ému. Il s’agissait seulement d’un homme qui disait ce qu’il ressentait, sans les artifices de la réthorique politicienne.

Et je me suis dit qu’à l’inverse de Newton, méchant bonhomme, dont le génie a franchi les siècles, Nicolas Sarkozy qui s’est efforcé comme un forcené de marquer son époque, en s’accaparant la paternité d’un nombre incalculable de décisions d’importances inégales, passera peut-être à la postérité pour un chic type, inefficace certes, mais sensible bien qu’un peu trop extraverti. Et qui sait, on ira peut-être jusqu’à rendre hommage à sa clairvoyance! L’avenir, en tout cas, n’est pas écrit et la postérité réserve parfois des surprises dans ses choix. Qui aurait pu penser en voyant la posture carnassière d’un Chirac des années 70, qu’il serait perçu aujourd’hui dans l’imaginaire collectif comme un brave homme aimant la convivialité paysanne et adorant flatter le « cul des vaches » au salon de l’agriculture ? Et pas seulement celui des vaches, si l’on en croit certaines vidéos diffusées avec obligeance sur le web.  

O tempora ! O mores !

Il en est d’ailleurs de même, pour les autres présidents de la République. D’ailleurs, « avec le temps » ce ne sont pas tant les options économiques qui émergent, que les comportements – louables ou critiquables – les décisions à caractère symbolique, les prises de position courageuses ou les regrettables errements : ainsi Giscard d’Estaing restera un grand bourgeois condescendant pour le petit peuple mais on persistera à approuver son action en faveur de l’émancipation féminine notamment l’autorisation de l’avortement. Pourtant, il continuera d’être vilipendé pour ces relations risquées avec des dictateurs africains.

Mitterrand, crédité à bon droit de l’abolition de la peine de mort, demeurera celui qui a renforcé durablement l’amitié franco-allemande et qui aura ardemment contribué à la paix par la construction européenne. Mais il traînera éternellement comme un boulet son caractère florentin, ses amitiés suspectes d’avant ou d’après-guerre ainsi que ses mensonges ; et ce en dépit, de nombreuses réformes progressistes.  De Gaulle, l’homme du 18 juin,  étrangement, échappe au lessivage et résiste aux épreuves du temps : la statue du commandeur est intouchable, probablement parce qu’en tant que fondateur de la 5ième République, le jugement de l’histoire se confond toujours avec des enjeux toujours actuels. Ça changera peut-être, le jour où l’on reviendra à une République plus équilibrée en faveur du Parlement. Mais ce n’est pas au programme de François Hollande, qui, lui, ambitionne, d’être un président « normal ». A lui de nous proposer sa conception de la normalité en la matière !  Modestement, je lui conseillerais volontiers d’être prudent, car on brûle volontiers ce qu’on a adoré à la Bastille. Et ce n’est pas nouveau, si l’on en croit la mésaventure de Marcus Manlius Capitolinus, au 4ième siècle avant J.C qui, héros d’un jour pour avoir sauvé Rome grâce aux oies du Capitole,  fut néanmoins jeté de la Roche Tarpéienne car il soutenait les doléances des pauvres.

« Il n’y a pas loin du Capitole à la Roche Tarpéienne ».

Pour conclure, en ce jour d’après scrutin, je souhaite simplement signifier que l’enthousiasme bien compréhensif de ceux qui estiment avoir gagné, ne dure jamais qu’un temps. Ensuite, la réalité imprévisible et souvent facétieuse se charge malheureusement de rétablir les proportions à la hauteur de la déception de ceux qui estiment avoir perdu. Seule l’histoire fera ultérieurement son tri de ce qu’il faut garder! L’enjeu c’est de faire en sorte que les déçus rejoignent les enthousiastes sans se renier.

Il en est de même pour tous les personnages privés – ceux de la famille et les amis de la famille –  dont je brosse ici le portrait, en vantant leurs qualités, leur grandeur d’âme ou en stigmatisant leur petitesse. Mon propos n’est pas de reproduire leur vérité que j’ignore le plus souvent et que je n’ appréhende qu’au travers de leurs métiers et de ce qu’ils nous ont légué volontairement ou non. Je les regarde dans leur époque et je prends le risque de dire ce que je pense d’eux. Mais nécessairement j’observe de ma fenêtre au vu des seuls éléments dont je dispose, alors qu’ils ont disparu depuis des décennies. Abstraction faite, si je peux, des hagiographies familiales trop complaisantes!

Mais la mémoire est nécessairement subjective. C’est comme le bulletin de vote et, comme lui c’est engageant.

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