A contrario de toutes les autres disciplines scientifiques, la climatologie moderne est passée du statut de théorie à celui de bréviaire où le doute n’est plus toléré et tout questionnement méthodique banni, sous peine d’encourir l’accusation suprême et infamante de « complotiste ». Pire! De climatosceptique!
Ainsi, le réchauffement de la Terre est désormais un dogme et tout événement météorologique, de quelque nature que ce soit et où qu’il se produise, doit être interprété à l’aune de cette théologie, comme une confirmation. Il n’y a guère que la tectonique des plaques à l’origine des séismes et le volcanisme qui échappent « encore » à cette « révélation unificatrice du Grand Tout de la Nature ».
De la sorte, s’il est admis que la théorie de la gravitation universelle d’Einstein puisse être remise en cause après la déroute épistémologique de celle de Newton, et qu’en outre, rien ne saurait demeurer figé dans le marbre d’intangibles connaissances universelles, le réchauffement climatique et surtout son imputation androgène ne sont en rien discutables.
Il en découle que le froid que l’on observe, ici et maintenant, n’est jamais qu’une preuve supplémentaire d’un réchauffement global. Seuls les ignorants y voient un soupçon de paradoxe. D’ailleurs, les commentateurs météo ne se privent pas de souligner, chaque fois qu’ils le peuvent, qu’une séquence climatique où on se les caille fait exception par rapport au reste du monde où le réchauffement grignote sans relâche, en multipliant les épisodes caniculaires beaucoup plus représentatifs de l’état climatique de notre planète. Et si cette mise en garde ne suffit pas, il est toujours possible de faire appel à la sécheresse qui transforme nos rivières en des oueds asséchés de contrées semi-désertiques et de brandir la menace d’une pénurie endémique d’eau au cours de l’été prochain, qui contraindrait les préfets à réglementer l’arrosage de nos potagers bio et l’usage des chasses d’eau dans les HLM ainsi qu’à surveiller les piscines privées avec des drones.
Les « vrais » hivers de nos enfances n’existeraient donc plus autrement que comme les supports virtuels de notre nostalgie d’un passé définitivement révolu.
Dans ce contexte, l’hiver de cette année 2023 qui apparait plus rigoureux que d’habitude sous nos latitudes, ne serait qu’une parenthèse froide et locale dans un environnement climatique global en danger imminent de surchauffe! Haro donc sur tous les frileux qui s’obstinent à faire confiance aux thermomètres pendus à leur fenêtre, car ce qui importe, ce ne serait pas tant ce qui nous fait frissonner mais ce que prévoient les modèles météorologiques et les algorithmes à ambition planétaire. Et que confirment d’ailleurs les cartes satellitaires aux allures de poumons fibrosés, que seuls les spécialistes savent décrypter et faire parler!
L’hiver « ressenti », surtout s’il nous apparait glacial au travers de nos moufles, ne serait en fait qu’une illusion trompeuse de nos sens, voire un épiphénomène isolé et non représentatif d’une tendance globale à l’échauffement! Tendance désormais élevée au rang de révélation évangélique par les éminents experts de la papauté climatique réunis au sein du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Leur infaillibilité n’est plus une hypothèse mais un fait avéré.
Pour cet aréopage de savants prophètes et putatifs sauveurs de la Terre, de l’humanité et même du « vivant » dans son ensemble, cette montée globale des températures irait de pair avec celle des eaux océaniques dont elle serait la cause. Elle serait d’ores et déjà inéluctable et dévastatrice. Sauf peut-être à battre collectivement et individuellement notre couple et à obéir sans broncher aux multiples injonctions liberticides dictées par notre inconduite passée, la descente aux enfers serait irréversible.
A l’appui de ce sombre pronostic, des cohortes de philanthropes académiques flanquées de jeunes ados hallucinées et probablement manipulées, exhibent des milliers d’études « scientifiques » qui enchainent les prévisions cataclysmiques, tantôt sur la fonte des neiges éternelles et des calottes glacières, tantôt sur la montée des eaux, tantôt encore sur la disparition de nombreuses espèces vivantes, prélude à une nouvelle et « sixième » extinction et même sur la multiplication des embrasements criminels des forêts. Seuls les virus et les bactéries tireraient leur épingle du jeu de ce bouleversement planétaire!
Après plus de quatre milliards d’années d’existence, la terre subirait donc un dérèglement quasi inéluctable et exceptionnel de ses subtils équilibres naturels, du fait des excès criminels d’une seule des espèces vivantes y ayant élu domicile, à savoir l’humanité. C’est tout juste si note insouciance condamnable d’émetteurs forcenés de gaz à effet de serre ne modifierait pas l’orbite de la Terre autour du soleil et n’inclinerait pas défavorablement son axe sur le plan de l’écliptique.
Bref, dorénavant on ne plaisante plus! Il faut se soumettre pour ne pas disparaitre! Tel est l’enjeu qu’on nous propose sous le vocable générique de transition écologique, voire énergétique et de recours systématique à la sobriété et à la tempérance. Bref, il nous faut renoncer, de gré ou de force, à ce qui caractérisait jadis une grande partie de notre qualité de vie et avec elle, notre joie de vivre. Une nouvelle fois, on nous chasse du Jardin d’Eden pour avoir croqué trop goulument une pomme génétiquement modifiée élevée aux pesticides.
Nous sommes donc fermement invités à accorder exclusivement notre confiance aux intelligences artificielles qui désormais prennent le relai de nos cerveaux embrumés pour prédire l’évolution de masses d’air, des températures et des précipitations. Et renoncer à nos propres sensations ou même aux mesures de nos antiques baromètres ou thermomètres.
Nos antiques instruments de mesure, à partir desquels nous basions depuis des siècles la métrologie du quotidien – celle de proximité – par l’observation de notre propre jardin ou du clocher de notre village, doivent non seulement être remisés et désormais regardés comme suspects, mais même carrément bannis ainsi que les dictons qui allaient de pair, du type » Noël au tison, Pâques au balcon » ou encore « S’il pleut à la Saint-Médard, il pleut quarante jours plus tard, à moins que Saint-Barnabé ne lui coupe l’herbe sous le pied »!
A quoi bon en effet persister à honorer ces niaiseries à connotation identitaire, alors que l’heure est au métissage des cultures et à la délocalisation des sensations et des impressions, dans le temps comme dans l’espace? A quoi bon, alors que le passé, le présent et le futur, comme la réalité et le virtuel se confondent et s’amalgament dans l’univers numérique, conférant à ce qui se passe aux antipodes autant d’importance qu’aux événements survenant au seuil de notre maison? .
Face à ce dérèglement complet de nos sensations climatiques, il ne reste plus guère que nos souvenirs d’enfance pour représenter une réalité hivernale qui ne se limite pas au cartes météo de nos téléviseurs avant le Journal de Vingt Heures! Ces pauvres souvenirs d’une époque où l’on s’apitoyait du sort des animaux errants par les nuits glaciales et que pour se chauffer, il fallait bourrer la cuisinière de la cuisine, de boulets de charbon entreposés en tas au fond du jardin.
Ainsi ce n’est pas sans une certaine mélancolie de ce monde disparu – vérité prosaïque de jadis – qu’on se remémore cet hiver 1962-1963 – il y a soixante ans – où en Anjou comme un peu partout en France, un froid quasi polaire survint, dès le début janvier. La Maine à Angers puis la Loire dans sa traversée de l’Anjou charrièrent des blocs de glace puis se figèrent. Les vieux, la génération de nos grands-parents, celle des poilus de 14-18 disaient n’avoir jamais vécu auparavant d’hiver aussi rigoureux, même dans les tranchées.
Le froid était arrivé dès la mi-novembre 1962 et s’était prolongé jusqu’au début mars 1963. Sur les côtes atlantiques proches de l’estuaire de la Loire, on notait des températures inférieures à -10 °C.
De surcroît, après une première vague, le froid s’était amplifié en janvier atteignant une intensité hors norme avec des températures ambiantes de vingt degrés en dessous de zéro.
Le dimanche, on partait en famille sur les bords de Maine ou de la Loire Angevine pour se régaler de ce spectacle polaire. Et on traversait le fleuve à « pieds secs » très en amont de Saint-Mathurin jusqu’aux Ponts-de-Cé et au-delà!
Sur le pont franchissant la Loire à Saint-Mathurin
La Maine à Angers
Du haut de leur chaire, les « experts » dirent par la suite que cet hiver fut probablement le plus froid jamais connu auparavant. On le savait d’instinct, comme les animaux sauvages qui moururent en grand nombre faute de nourriture sur les terres gelées.
On respirait alors à pleins poumons l’air glacial venu d’Europe centrale, sans prendre conscience alors de notre bonheur de vivre! Mais les temps ont changé. On ne reconnait plus l’hiver qui n’est plus l’hiver mais est devenu le prélude virtuel à la canicule.
D’Europe Centrale, ce sont désormais les bruits de la guerre qui nous glacent le sang et non le froid! Quant à nos poumons, ils s’époumonent! Et notre inspiration s’épuise.
Quelle chance nous avons eue de connaitre l’hiver dépouillé d’algorithme!
___