C’est au petit matin du 5 août 1914 que le 135ième Régiment d’infanterie de ligne franchit le portail de la caserne Desjardins d’Angers pour partir à la guerre. Empruntant l’avenue du Général de Lamoricière, le régiment se dirigea vers la gare Saint-Laud, à trois kilomètres de là, par le boulevard Pasteur et le boulevard de Saumur, pour être transporté en chemin de fer vers la Lorraine puis la frontière belge. A cet instant, les soldats savaient que, la veille, l’Allemagne avait déclaré la guerre à la France et que l’armée allemande avait envahi la Belgique. La mobilisation c’était devenu la guerre!
Les troufions dont les chaussures à clous battaient le pavé, n’avaient pas tous l’allure martiale. L’esprit encore embrumé, pour s’être trop attardés à bavarder après l’extinction des feux, certains marchaient comme des automates. Les uniformes n’étaient pas tous ajustés. Mais au point où ils en étaient, ces paisibles civils transformés soudainement en soldats de l’an II avaient presque hâte d’en découdre. Et, au plus vite pour être de retour dans leurs foyers, leurs ateliers et leurs champs à l’automne. Ils étaient convaincus de leur suprématie offensive. Assurés de défendre la civilisation face à la barbarie, ils pensaient que le Droit triompherait et ils se voyaient déjà rentrer sains et saufs au bercail en septembre – au plus tard pour les vendanges d’octobre – auréolés du prestige de la victoire. Personne, nulle part, ne doutait en effet de la supériorité de l’armée française.
Certes, tous eurent une courte période de blues à l’annonce de la mobilisation générale, due au désagrément d’être enlevés à leur travail, à leur famille et aux fêtes votives du cœur de l’été, alors que les moissons n’étaient pas tout-à-fait achevées. Mais, somme toute, les réservistes, faisaient contre mauvaise fortune bon cœur, et ils étaient désormais « plutôt » contents de se retrouver entre copains, dans la chambrée, à se serrer les coudes, là, où quelques années auparavant, ils avaient effectué leur service militaire. Comme si, conscrits pour la seconde fois, ils s’apprêtaient de nouveau à refaire le mur, ruser avec les juteux et rêver de faire la fête en attendant la quille.
Depuis trois jours qu’ils avaient rejoint « leur » caserne Desjardins, ils ne s’étaient d’ailleurs pas privés d’arroser les retrouvailles et d’évoquer le bon vieux temps, en sirotant du vin de pays. Parfois copieusement pour surmonter quand même une sourde inquiétude. Et même plus que de raison, car l’ivresse possède l’incroyable faculté de gommer l’angoisse. Nombreux d’ailleurs étaient ceux qui avaient gonflé leur havresac, non seulement de charcutailles indispensables pour saucissonner peinards sur la route, mais aussi de bonnes bouteilles de vin rouge aigrelet des coteaux de la Loire angevine ou nantaise. Certains avaient emporté des crus sirupeux du Layon. Picoler devint un passe-temps parmi d’autres, plutôt privilégié, en tirant sur une bonne bouffarde de tabac gris. Dans la boue des tranchées ou terrés dans les trous d’obus, ils s’apercevront bientôt que les vapeurs d’alcool et les fumées âcres constituent même une thérapie efficace pour surmonter l’odeur fétide et nauséabonde des cadavres en décomposition attaqués par les rats. Ils ne le savaient pas encore.
Car, pour l’heure, dans cette apparente précipitation de la mobilisation, il fallait aussi tromper le temps. Sortir des « vannes » – de préférence un peu graveleuses – pour égayer les longues files d’attente et de piétinement dans la cour de la caserne avant l’enrôlement officiel ou les séances d’essayage dans les magasins d’équipements. Chaque poilu en puissance se voyait en effet attribuer un uniforme, comprenant notamment une capote, un pantalon et des godillots. On devait également l’armer d’un fusil et d’une baïonnette, sans oublier les munitions. Pour forme – vraiment pour forme – juste pour distinguer les vrais des faux culs-de-jatte et déceler les tire-au-flanc , il y avait aussi la visite devant le médecin-major!
Il faut dire que la mobilisation générale tomba sur ces jeunes réservistes, presque sans prévenir. Par surprise. Elle bouscula brutalement leur vie; une vie qu’ils venaient tout juste de prendre en main. Certains étaient chargés de famille. Mais ce retour forcé vers la caserne leur permit aussi de revoir des copains de « la classe », perdus de vue depuis plusieurs années. Tous pressentaient sans vouloir y croire, que l’existence des prochains jours ou semaines serait sûrement moins réjouissante devant l’ennemi. Alors, il s’agira de défendre les « frontières menacées ». Aussi, la plupart entendait profiter au maximum de ce laps de temps, qui leur était dévolu avant d’affronter un univers inconnu forcément parsemé d’embûches et de périls. Les officiers, souvent eux-mêmes réquisitionnés, se montraient compréhensifs et réalistes et toléraient, sans trop se faire prier, certaines entorses à la discipline militaire. Manifestement, ils fermèrent les yeux sur l’intrusion répétée sur la « place d’armes », des épouses, des enfants ou des parents des soldats, venus les encourager et leur dire adieu! Pourtant le règlement précisait qu’en principe, hormis les troupes, les conscrits et les camions hippomobiles d’approvisionnement ou de fourrage, personne n’était plus autorisé à franchir le portail de la caserne …
Les sorties en colonne, tambours et musique en tête, hors de l’enceinte, comme celle effectuée le 4 août, place Saint Serge, pour la « remise du drapeau » par le commandant du 135ième RI, le colonel Bazelaire, étaient autant d’occasions d’exalter le patriotisme et le moral des troupes et de la population. Laquelle, depuis l’annonce de la mobilisation générale, le 1er août vers seize heures trente, par le maire d’Angers sur le péristyle de l’hôtel de ville, multipliait – spontanément ou non – les manifestations de soutien à l’armée à la gare Saint-Laud, place du Ralliement ou encore à proximité des casernes de la garnison angevine…On discutait beaucoup sur les places publiques!
Ce 5 aout 1914 au petit matin, ils furent près de trois mille deux cents soldats et sous-officiers du 135ième de ligne à sortir au pas de la caserne Desjardins, la fleur au fusil, avec leur deux-cents chevaux et mulets. Résolus et confiants, ils semblaient animés d’un sentiment mêlé de devoir à assumer, de résignation devant une fatalité sur laquelle ils n’avaient pas de prise et de fierté d’être appelés à contribuer à punir l’agresseur teuton, à effacer la défaite de 1870 et à reconquérir l’Alsace et la Lorraine. Ils étaient tristes aussi de devoir quitter leurs familles, leurs femmes et leurs enfants, qui les encourageaient, les yeux embués de larmes, de leurs ultimes baisers, aux grilles de la caserne. Leurs petits « queniaux » à la chevelure ébouriffée, en blouse et en galoches, s’agrippaient aux barreaux de la clôture et cherchaient à repérer leurs pères parmi ces guerriers courageux qui partaient pour le front.
Tout au long du parcours, de nombreux angevins s’étaient massés sur les trottoirs des boulevards pour les accompagner de leurs vœux jusqu’à la gare Saint-Laud en chantant la Marseillaise. Ce mercredi 5 août n’était pas férié et c’est en se rendant à leur travail que la plupart des habitants d’Angers, applaudirent le 135ième RI qui traversait la ville ! Mon arrière-grand-père Alexis Turbelier (1864-1942), clerc dans une étude notariée, proche de la place du Ralliement était-il de ceux-là (billet du 13 septembre 2011) ? De même que ses enfants, en particulier Germaine (1896-1990) et Alexis Turbelier (1897-1918)? Je les imagine applaudissant le régiment au passage du boulevard de Saumur à l’angle de la rue d’Alsace, de la rue Bressigny ou encore d’un carrefour du Hara, encombré des chevaux réquisitionnés des campagnes alentour. On peut penser qu’ils recherchèrent dans cette troupe anonyme des visages connus du quartier de la Madeleine, des camarades de patronage!
Ce moment exceptionnel de communion du peuple et de son armée décida-t-il, deux ans plus tard de l’engagement d’Alexis dans les rangs du 135ième? Engagement qui lui fut fatal dans la Somme au printemps 1918 (billet du 10 octobre 2011). Michel Joseph Gallard (1896-1962), employé de banque et futur mari de Germaine Turbelier, a-t’ il, lui aussi, assisté à l’évènement? Devenu sous-lieutenant, il sera grièvement blessé en 1918 à la tête d’une section du 135ième RI, lors de l’ultime offensive d’envergure de l’armée allemande en Picardie (billet du 28 janvier 2014).
En ce 5 août 1914, aucun de ces pioupious, presque tous angevins ou bretons, qui défilaient dans les rues d’Angers, leur fusil Lebel sur l’épaule, derrière leurs tambours et leurs drapeaux, ne se doutait qu’ils se feraient « proprement » étriller dès les premiers affrontements. Personne n’aurait imaginé que le pantalon rouge garance de leur uniforme tout neuf, serait – pour nombre d’entre eux – leur linceul.
Au soir du 23 août 1914, un peu plus de deux semaines après leur départ d’Angers, quelque part dans la région de Bièvres en Belgique, le bilan des pertes humaines se révéla pourtant d’une cruauté sans appel : quelques mille cinq cent soldats – dont dix-sept officiers – avaient été tués, blessés ou avaient disparus. Dès ce premier engagement frontal, les soldats angevins furent soumis à un déluge de feu et de fer. Confronté aux tirs impitoyables d’une artillerie allemande à l’efficacité insoupçonnée, le 135ième Régiment d’infanterie d’Angers avait dû maintenir une insoutenable position pendant plus de cinq heures pour protéger le repli de l’armée française…
Sous cette avalanche d’obus meurtriers, ces paysans de la vallée de la Loire, ces artisans du haut-Anjou, ces ouvriers angevins du chanvre ou de la chaussure, ces journaliers du bocage maugeois, ces mineurs du pays d’Ancenis ou ces descendants des chouans de Mayenne, toutes conditions sociales confondues, comprirent alors que cette guerre ne serait ni fraîche, ni rapide, ni joyeuse. Ils devinèrent alors qu’ils seraient sacrifiés en grand nombre, que là était leur devoir et qu’ils deviendraient pour toujours des héros incompris de la Grande Guerre, car l’enfer est indicible. Aussi surent-ils dès cette fin d’août 1914 que leur sort n’aurait plus rien de commun avec celui des gens de l’arrière.
Par la suite, le 135ième RI fut associé à presque toutes les grandes batailles. En conséquence, ces effectifs durent constamment être reconstitués pour compenser les très lourdes pertes qu’il subira durant toute la guerre jusqu’à l’armistice de 1918. Dès septembre 1914, il est une nouvelle fois endeuillé sur la Marne où plusieurs centaines de ses soldats sont mis hors de combat, dont plusieurs « gâs de la Madeleine », en particulier Eugène Loyer (1883-1914) un employé de bureau, et Edouard Béduneau un jardinier de vingt-deux ans du chemin des Mortiers. En décembre, c’est une connaissance du voisinage des Turbelier – Léon Chauviré (1880-1914) gendre de Baptiste Duguet, leur épicier de la rue Desmazières – qui décédera au « champ d’honneur » succombant à ses blessures dans un hôpital de campagne.
Au début de l’année 1915, le 135ième RI participe à de très rudes combats au nord d’Ypres en Belgique où les allemands employèrent pour la première fois des gaz asphyxiants. Le 29 mai 1915, c’est Marcel Pasquier, soldat du Lion d’Angers, engagé dès le premier jour au 135ième RI, qui sera tué à Neuville-St-Vaast : il était cousin germain de mon grand-père paternel.
Au printemps 1916, on retrouve le régiment à Verdun, où d’avril à septembre 1916, il est presque en permanence en première ligne. Près de mille soldats sont encore sacrifiés, dont de nombreux angevins.
Dès janvier 1917, le 135ième régiment se retrouve dans la Somme, puis dans l’Aisne et enfin en Champagne : l’année des révoltes et des fusillés pour l’exemple, fut paradoxalement moins exposée que les précédentes et les pertes du régiment angevin furent moindres… En revanche, l’année 1918 fut particulièrement meurtrière pour le régiment qui combattra alternativement dans la Somme et en Lorraine : le 16 avril, Alexis Turbelier, mon grand-oncle, sera tué par un obus dans le secteur d’Ainval non loin de Montdidier. Jusqu’à l’armistice, le 135ième RI sera mis à rude épreuve, se battant jusqu’à l’ultime seconde du conflit.
Il participera, conformément aux accords d’armistice à l’occupation rhénane de la Sarre et ne quittera définitivement l’Allemagne que le 20 septembre 1919.
Le 22 septembre 1919, il retrouvera Angers et rentrera enfin au bercail, en franchissant « en sens inverse » le « fameux » portail de « sa » caserne Desjardins. Huit jours plus tard, de conserve avec le 6ième Génie et le 33ième régiment d’Artillerie, il sera fêté au cours d’un défilé « monstre » dans la ville pavoisée aux couleurs de la France et de l’Anjou, de la place André Leroy jusqu’à la mairie, en passant par le boulevard « Foch ». Le lieutenant Joseph Gallard – mon grand-oncle – caracolait à cheval en tête de sa section. La fête comportait néanmoins une ombre monumentale: quatre-mille-deux-cents quatre soldats et sous-officiers du 135ième d’infanterie avaient perdu la vie entre 1914-1918. Plus que les effectifs initiaux du régiment !
Cinquante ans plus tard, le 21 septembre 1969, l’entrée de la caserne Desjardins, située au carrefour de l’avenue du Général Lamoricière et de la rue Villebois-Mareuil, fut baptisée « Rond-point du 135ième et du 335ième R.I. » et une plaque d’ardoise, commémorant leur départ de 1914 et leur retour de 1919, fut apposée sur le soubassement de la grille de la caserne Desjardins, près du portail. De nombreux anciens, survivants du massacre, devenus octogénaires, assistèrent à cette cérémonie émouvante et patriotique. Germaine Turbelier « veuve du lieutenant Gallard » – ma grande tante – figurait parmi les invités d’honneur, elle qui avait perdu un frère, le caporal Alexis Turbelier dans cette « mal nommée » Grande Guerre.
De cette caserne Desjardins de légende, il ne reste plus aujourd’hui que ce portail bleu ardoise de l’entrée principale, ainsi que quelques mètres de la grille d’enceinte et les deux petits bâtiments postes de garde, qui l’encadraient… Le reste, c’est-à-dire le corps principal de la caserne, un ensemble austère de constructions militaires, des écuries, des salles d’armes et surtout un bâtiment compartimenté de dortoirs d’une cinquantaine de mètres de long, érigés selon les standards de l’architecture militaire de la 3ième République, a été détruit au profit d’un ensemble urbain d’environ quatre cent logements neufs encadrant un square central. Des bambins batifolent sur des pelouses, là où, cent ans plus tôt, les troupes manœuvraient avant de mourir sur les théâtres de la guerre.
Pour ceux qui cultivent la nostalgie des armées d’antan – ce n’est pas mon cas – le choc fut probablement rude d’observer, impuissants, dans les années 2000, la casse programmée de leur caserne, sous les coups de boutoir des engins de démolition et des bulldozers. En effet, depuis une cinquantaine d’années, tous les édiles municipaux angevins, quelles que soient leurs convictions politiques, eurent la manie de raser tout ce qui rappelait l’essor industriel et républicain du siècle de Victor Hugo, considérant étrangement que la conquête de la modernité passait forcement par la casse systématique des constructions du passé. Rien de pire à leurs yeux que les témoins architecturaux de la troisième République… Ainsi, ont-ils fait raser sans état d’âmes, la vieille gare Saint-Serge du Petit Anjou et un ensemble d’immeubles en contrebas du château, quai Ligny, pour y faire passer …une autoroute!! Et bien sûr la caserne Desjardins!
Il ne reste donc plus qu’un portail pour porter le poids de l’histoire! Difficile dans ces conditions d’entretenir le souvenir d’une troupe de citoyens en armes, lorsqu’il ne subsiste plus pour porter témoignage de ce passé « glorieux » que des bâtiments modernes à toit plat d’apparence « zingué », constitués de cubes plus ou moins réguliers, recouverts d’un mortier blanchâtre lisse et uniforme, en alternance avec des parements de simili-bois, cernant des espaces verts devenus miteux sous l’effet conjugué et corrosif des déjections canines et du piétinement des gamins…
Les heureux bénéficiaires du futur service civil (et citoyen) – dont notre gentil petit président louis-philippard semble vouloir assurer la promotion – déambuleront peut-être prochainement dans ces lieux, un parka fluo sur le dos, armés d’une pince télescopique pour récupérer les préservatifs usagés ou les seringues dans les fourrés ou les bosquets de l’ancienne cour de la caserne, sous l’œil vigilant d’un grand frère associatif, compréhensif et agréé par le ministère! L’adjudant de carrière un peu gueulard n’est plus de mode!
Merci pour tous ces éléments, qui me manquaient dans le dossier de mémoire que je reconstitue tant bien que mal, puisque mon père n’avait jamais connu le sien, qui faisait également partie du 135ème R.I.et qui lui aussi a été tué au tout début de cette salle guerre – à BIÈVRE ( BELGIQUE), le 23 Février vers 10h30, sur la route de DINANT, à proximité de la ligne de chemin de fer. Le choc a dû être terrible, comme d’ailleurs l’ensemble des affrontements de la bataille des frontières.
J’étais sur place, avec mon épouse, pour le centenaire, à l’heure même où il a été tué pour la France et notre avenir commun. Et j’en suis fier.
Merci pour ce commentaire émouvant.
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Germaine Turbelier n’a pu regarder le 135ème RI sur le Boulevard de Saumur (Bd Foch actuellement), n’étant pas encore salariée du Crédit-Lyonnais ce jour-là.
En effet, elle fit partie des cinq premières femmes embauchées par cette banque du fait du départ des jeunes et moins jeunes soldats. Par contre, son futur fiancé, Michel-Joseph Gallard aurait pu, mais la mémoire n’est pas arrivée jusqu’à moi. Ils se connurent donc au service de la conservation des titres et se plurent. Pourtant, il paraît que Michel-Joseph Gallard avait proclamé qu’il n’épouserait jamais une femme qui travaille ! Les collègues étaient jeunes, semble-t-il, dont un Mr Chauviré surnommé Rigadin mais avec un prénom que j’ai oublié.
Leur chef de service était Monsieur Thibault (prénom ?) sans descendance, de même que son cousin germain célèbre, Anatole France. Les jeunes ont fait pas mal de « niches » (farces) à ce « Père Thibault », style saucisses grillées sur un poêle… Dans mon enfance, on m’a souvent raconté par le menu (c’est le cas de le dire) ce genre d’exercices d’autant plus réjouissants que l’odorat du chef était souvent pris en défaut. Mais ceci se passait avant le départ de la classe 1916 (en fait prévu pour 1915). Cependant, Michel-Joseph Gallard fut reconnu trop maigre et il attendit le temps normal pour rejoindre l’école d’officiers de Saint-Maixent, puis le front, (grave blessure en juin 1918) pour finir la guerre en 1919 en occupation de la Lorraine puis de l’Allemagne.
S’agissant de Germaine Turbelier, il ne s’agissait ici que d’une hypothèse, sous mode interrogative. Elle est levée. Dont acte
Merci de la photo du portail de la Caserne Desjardins. Un souvenir de famille : En juin 1940, c’est Michel-Joseph Gallard qui ferma définitivement cette caserne, à l’approche des armées de « l’occupant ». Précisions : il lâcha tous les chevaux qui s’y trouvaient afin que d’autres propriétaires s’en emparent et d’éviter qu’ils deviennent « allemands ».
En ce qui concerne le Mr Chauviré auquel j’ai fait référence plus haut, son prénom était Joseph je crois, sa femme avait de la famille dans l’Yonne et ils eurent un fils André dont la famille émigra en région parisienne, toujours employé du fameux Crédit Lyonnais. Mr et Mme Chauviré et même André restèrent en relations avec la famille Gallard-Turbelier, toute leur vie. Il me semble que les parents Chauviré dans leur jeunesse aimaient la danse (de salon). Ils firent partis des sinistrés du bombardement du 28 mai 1944 rue Albéric Dubois et échouèrent dans le quartier des Justices. Etait-il de famille même lointaine avec Léon Chauviré dont J.L. parle dans son billet ?
Merci pour ces nouvelles précisions, notamment sur le rôle de Michel-Joseph Gallard en juin 1940. A propos des bombardements d’Angers, je me souviens qu’une certaine « Marthe », amie d’Adrienne Venault-Turbelier, et apparentée à la famille Duguet/Chauviré avait été victime de ces bombardements dans le quartier de la gare Saint-Laud, au cours desquels son mari avait été tué…
A Nantes, un archiviste municipal a fait une liste des victimes relatives aux bombardements. Je ne sais si à Angers pareil travail de fourmis a été effectué.
A l’attention de Dominique Delestre :
Avez-vous regardé aux archives départementales de Maine-et-Loire du côté des fiches matricules militaires ? Sur généanet, vous avez indiqué un numéro 5133, mais ceci correspond à la classe 1909 (arrivée au corps). Pour voir la fiche matricule il faut voir classe 1909 évidemment mais le N° 1644 (Angers – vue 211). Le résumé de la courte carrière guerrière de votre grand-père est bien inscrit (3 août au 23 août 1914). Mais avant il avait dû faire du service militaire de 1910 à septembre 1912 au 151 R.I. Vous y trouverez aussi les deux adresses à Saumur. Par ailleurs, vous avez sûrement regardé la fiche manuelle de son décès, sur le site Mémoire des hommes.
En 2015, c’est par erreur et un peu de précipitation que j’ai indiqué que mon père avait fermé les portes de la caserne Desjardins, en fait il s’agissait de la Caserne d’ESPAGNE… mais il a bien lâché les chevaux afin que l’armée allemande ne s’en empare pas. Rectification faite donc !
Ce soir 14 décembre 2019, j’aimerais rendre honneur à un copain de mon père (voir Michel-Joseph Gallard), BORIS RODAT. Ils appartenaient tous deux, bien entendu au 135ème R.I.
Boris Rodat fut malheureusement le PREMIER OFFICIER FRANÇAIS tué en Pologne sur le front de Galicie, a écrit mon père (le 26 juillet 1919), « sur le front ukrainien polonais à Zosckoff » d’après sa fiche militaire, le 28 juin 1919. Son inhumation se fit à Lemberg tandis que l’avis de décès ne parvint à Nantes que le 20 avril 1920. D’après mon père, il venait de se marier en décembre 1918.
Il était né à Nantes, le 7 août 1897. Engagé volontaire le 17 juillet 1915, caporal en avril 1916, sergent le 1er mai 1916, il fut nommé sous-lieutenant à titre temporaire le 31 octobre 1916, puis lieutenant à titre temporaire le 31 octobre 1918 et définitif le 24 novembre 1918. Enfin, il fut mis à disposition du Comité National Polonais.
Ses états de service ont amené ses supérieurs à le pourvoir de nombreuses citations. J’en ai retenu deux : en 1916 « sous-officier d’élite… a toujours fait preuve d’énergie et de sang-froid. Les officiers de sa compagnie ayant été tués ou blessés pendant l’attaque du 10 octobre, a pris immédiatement le commandement de la Cie, dans des circonstances difficiles et a maintenu ses hommes sous un violent tir de mitrailleuses ».
Il fut blessé le 18 avril 1918 au BOIS ALLONGé bien connu dans notre famille puisque Alexis TURBELIER, notre oncle ou grand-oncle y trépassa et mon père y fut aussi. Le 3 mai 1918, une citation lui fut décernée à ce sujet : «… est resté à son poste et ne l’a quitté que 4 ( ?) jours après, évacué par ordre pour recevoir des soins urgents ».
Il fut décoré de la Croix de Guerre avec deux étoiles d’argent. Il aurait bien mérité la Légion d’Honneur (mon père dut la demander pour lui-même en 1952)
Bravo pour cet hommage émouvant justement rendu à cet ami de Michel Joseph Gallard et pour cette évocation passionnante des actes de courage au combat de Boris Rodat.